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Les prévisions de Camoens ne tardèrent pas à s’accomplir. Le Portugal, ce royaume né d’une victoire et mort dans une défaite, tomba bientôt sous le joug de Philippe ii. Ce monarque visitant ses nouvelles provinces, s’informa du poète, et, en apprenant qu’il n’existait plus, il témoigna un vif regret.

Pedro de Mariz raconte qu’un noble Allemand écrivit à son correspondant de Lisbonne de chercher la place où Camoens était enterré, et, si ce grand poète n’avait pas un tombeau digne de lui, il le chargeait de s’arranger avec la ville pour obtenir la permission de lui envoyer ses os avec toute la décence et le respect qui leur étaient dus. Ce généreux Allemand s’engageait à élever à l’Homère portugais un mausolée comparable à ceux des anciens les plus illustres.

Ce fut peut-être cette démarche faite par un étranger qui rappela aux compatriotes de Camoens que l’auteur des Lusiades n’avait pas de tombe. Seize ans après sa mort, un ami des lettres qui peut-être était absent quand il mourut, dom Gonçalo Coutinho, fit chercher sa sépulture et la rétablit dans un endroit voisin du chœur des religieuses. Il la couvrit d’une simple pierre presque au niveau du sol, sur laquelle il inscrivit cette épitaphe :


Ci gît Luiz de Camoens, le prince des poètes de son temps ; il vécut pauvre et misérablement et mourut de même, l’an 1579.


Et plus bas :


Cette tombe a été construite aux frais de dom Gonçalo Coutinho. Que personne n’y soit plus enterré.


C’est un beau résumé de la vie de Camoens que cette simple ligne :
Il vécut pauvre et misérablement et mourut de même.

On ne pouvait dire moins de celui qui avait souffert tant de traverses, combattu à tant de batailles, et, comme dit Jose Indio,