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LITTÉRATURE AMÉRICAINE.

prêtait à fondre sur lui. Ses ennemis extérieurs allaient entrer contre lui en guerre ouverte. Ce sac plein d’or et de joyaux, trouvé sur la personne du voleur supposé, c’était encore une circonstance que l’on n’avait pas manqué de raconter dans Grenade avec toutes les exagérations convenables. Une question de juridiction territoriale fut bientôt élevée par le capitaine-général, l’ennemi invétéré du gouverneur. Le capitaine-général prétendait donc que le prisonnier avait été arrêté hors des dépendances de l’Alhambra, et dans le ressort de la capitainerie générale. Il demandait en conséquence que la personne du délinquant lui fût livrée ainsi que les dépouilles opimes saisies avec elle.

Le moine n’avait pas non plus laissé ignorer au grand inquisiteur que des croix, des rosaires et d’autres reliques avaient été trouvés dans le sac en question, et le grand inquisiteur réclamait de son côté l’accusé comme coupable de sacrilège, et déclarait que ces saintes richesses appartenaient à l’église, ainsi que le corps du prisonnier au premier auto de fé.

La querelle s’échauffait. Le gouverneur furieux avait juré que plutôt que de livrer son prisonnier, il le ferait pendre dans l’Alhambra, comme espion saisi sur les frontières de la forteresse.

Le capitaine-général menaçait d’envoyer un corps de troupes qui s’emparerait du prisonnier, et le transférerait de la tour Vermilion dans la prison de la ville.

Le grand inquisiteur semblait aussi fort disposé à expédier vers l’Alhambra un certain nombre de familiers du saint-office.

Un soir, assez tard, le gouverneur fut averti de ces machinations.

— Eh bien ! qu’ils viennent, dit-il, nous verrons s’ils me trouvent en défaut. Il aura besoin de se lever avec bien de l’éclat et de grand matin celui qui compte surprendre un vieux soldat !

Là-dessus, il donna l’ordre de faire passer le prisonnier, dès