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tête encyclopédique qui cumulait toutes les capacités. À peine osons-nous, frivole chroniqueur, enregistrer cette calamité publique sur ces pages légères où nous inscrivons gravement tant de riens et de futilités. Mais parmi les nombreuses places que cet homme de génie laisse vacantes, il en est une au moins dont il nous appartient de discuter l’héritage. Nous voulons parler de la succession au fauteuil académique de M. Cuvier.

Assurément, si l’académie avait quelque tact, il est un point qu’elle s’empresserait d’abord d’éclaircir et de fixer. Est-il bien vrai, comme on l’assure, que M. Béranger s’obstine à ne pas permettre qu’on le porte au fauteuil ? Si le fait est réel, il faudrait au moins le constater au plus vite. Ce serait bien simple. Que M. Béranger soit sommé d’accepter. Ainsi mis en demeure, s’il refuse, alors il encourra seul toute la responsabilité du refus, et l’académie sera déchargée, ce qui importe fort, il nous semble, à sa considération.

Au défaut de M. Béranger, il est d’autres écrivains essentiels que l’académie va sans doute tenir à l’honneur d’appeler au plus tôt à elle, en les dispensant même de toute candidature.

M. Charles Nodier, par exemple, sera peut-être enfin élu cette fois.

— Non pas, diront messieurs de l’institut. M. Charles Nodier est bien poète et savant, et nous aiderait fort à finir le dictionnaire ; mais il fait fi de nous, et ne veut point entendre parler des visites.

— C’est donc M. Victor Hugo que vous allez faire asseoir auprès de M. de Lamartine !

M. Victor Hugo ! oh ! non pas encore. Les choses n’en sont pas à ce point ! M. Victor Hugo est jeune, il a du génie, et peut attendre. D’ailleurs, une fois entré chez nous, il ouvrirait d’abord les deux battans de notre porte. Après lui viendraient bientôt tous les autres, MM. Sainte-Beuve, De Vigny, Mérimée, Alexandre Dumas ; ce serait trop en vérité.

La question va donc vraisemblablement s’agiter entre M. Thiers et M. de Salvandy. Mais M. Thiers a fait ses preuves comme écrivain et comme orateur ; M. Thiers est homme d’esprit et homme d’état ; — tout bien pesé, M. de Salvandy sera nommé.