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tection du ciel, non-seulement le moine est sauvé de la griffe des diables, mais avec lui leur échappe aussi la tentatrice qui se convertit, et devient un ange. Tout l’enfer, enragé de cette mystification, vient alors, pour se venger, faire un sabbat complet dans la grotte de l’ermite ; mais le paradis s’entrouvre, et les légions du ciel en descendent afin de mettre ces mauvais diables à la raison.

Le libretto de cet opéra-ballet, que l’on attribue à un homme de beaucoup d’esprit, voudrait bien passer pour sérieux, mais on n’est pas dupe de cette malice, et l’on voit d’abord que ce n’est au fond qu’une joyeuse et divertissante moquerie. Ce grand ouvrage est d’ailleurs monté tout entier avec un luxe incroyable et un soin parfait. Les décors, de la composition de MM. Ed. Bertin, Eugène Lamy, Camille Roqueplan, Feuchers et Paul Delaroche, rivalisent de grandeur et de magnificence. Quant à la musique de MM. Halevy et Gide, quoique parfois un peu indécise, elle est en général bien appropriée aux situations, et plusieurs de ses morceaux de chant, entre autres, le chœur des démons au troisième acte, feront assurément fortune. Pour mademoiselle Duvernay, si gracieuse, si élégante, si expressive dans tout le rôle de Miranda, elle peut aussi, sans nul scrupule, s’attribuer une belle part de l’immense succès de la Tentation.

Disons maintenant quelques mots du petit nombre de livres que nous avons reçus durant cette quinzaine.

Les Mélancoliques[1] de M. le chevalier Joseph Bard se recommandent surtout par leur curieuse préface. Il faut lire tout entier dans le livre ce singulier morceau, malheureusement beaucoup trop long pour être transcrit ici. L’auteur y proclame, entre autres choses, l’avènement prochain de la spiritualité politique, vers laquelle, dit-il, nous marchons à pas de géant. J’aurais bien voulu que M. Joseph Bard se donnât la peine de nous expliquer ce qu’il entend par cette spiritualité politique. Il serait bon, ce me semble, que nous pussions savoir où nous allons si vite. Quant aux poésies de M. Bard, elles justifient en général

  1. Chez Eugène Renduel.