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sance, au carnaval dernier, mais elle s’est singulièrement amoindrie pendant le procès : à peine y a-t-il eu moyen de condamner à la déportation, ou bien à la détention et à la surveillance des polices, quelques Catilinas subalternes et obscurs ; il a fallu d’ailleurs acquitter tout le reste. Ce n’étaient plus que de pauvres ouvriers conspirateurs assez mal payés par la légitimité, et qui vraiment avaient travaillé pour elle en conséquence. Quoi qu’il en soit, à propos de ces sortes d’affaires, si chargées d’incidens et si compliquées, il faut admirer combien le métier de juré devient chaque jour plus difficile et demande maintenant de sagacité. Au milieu de tant d’accusés, de chefs d’accusation, de témoins, d’avocats-généraux et d’avocats particuliers, comment voulez-vous que des honnêtes marchands, devenus soudain des juges, ne perdent pas la tête ? Le moyen pour eux de ne pas absoudre ou condamner un peu au hasard, à la grâce de Dieu : ainsi font-ils, la main sur la conscience, et probablement nous ferions tous ainsi.

Cependant, au défaut des émeutes et des grandes commotions politiques, les petits évènemens ne nous ont pas manqué pendant cette quinzaine.

Victime d’un affreux guet-à-pens, M. Quiclet, si célèbre par ses querelles électorales avec feu M. le président Amy, a péri ces jours derniers misérablement assassiné.

Plusieurs hommes recommandables et haut placés dans l’art et dans la science, M. Berton, fils de l’auteur d’Aline, et musicien distingué lui-même, M. Portal le médecin, M. Saint-Martin l’orientaliste, ont aussi succombé récemment aux nouvelles attaques de l’épidémie.

M. Talabot, l’apôtre, est mort également du choléra, et son convoi s’est fait en grande pompe selon le rit saint-simonien. Cette pauvre religion saint-simonienne semble bien, en vérité, toucher elle-même à sa fin. Les persécutions l’auraient peut-être sauvée, aussi les appelait-elle de tous ses vœux ; mais ce n’est plus le temps des bourreaux et des martyrs. C’est le temps des commissaires de police et de la garde municipale. C’est le temps de la cour d’assises. On traduit donc devant elle le père