Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 7.djvu/635

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
635
VOYAGE DANS LA COLOMBIE.

et lisses, divisés sur le milieu de la tête, retombent des deux côtés sur leurs épaules. La seule arme qu’emploient les Indiens est une sarbacane d’environ six ou sept pieds de long, au moyen de laquelle ils lancent à une soixantaine de pas de petites flèches, d’un bois dur, dont la pointe est empoisonnée et la tête entourée de coton, afin de remplir exactement le tube. Le poison dont ils font usage est, m’a-t-on dit, le suc d’une liane, qui, à l’état solide ou liquide, a la plus grande ressemblance avec le caoutchouc. Ses effets paraissent entièrement semblables à ceux du curare des bords de l’Orénoque. Comme ce dernier, il n’agit que sur le sang dont il arrête la circulation, et l’on peut le prendre impunément à l’intérieur. L’homme ou l’animal blessé commence par éprouver des vertiges, tombe et meurt. Les seuls remèdes qui puissent, dans ce cas, préserver d’une mort certaine, sont le sirop de canne à sucre, ou l’ail, écrasé dans un peu d’eau, pris immédiatement après la blessure. M. Salaza m’assura que, dans la guerre de l’indépendance, il avait eu sous ses ordres un corps d’Indiens armés de ces sarbacanes, qui, dans plus d’une occasion, avait rendu de grands services contre les Espagnols. J’ai rapporté une certaine quantité de ce poison en France, pour en faire faire l’analyse ; mais le vase dans lequel il était contenu, ayant sans doute été mal bouché, cette substance avait, à mon arrivée, perdu toute sa vertu.


de raigecourt.