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INFLUENCE DES MOEURS SUR LES LOIS.

la puissance des mœurs, que là même où elles sont peu fécondées par les lumières de la civilisation, leur action politique est sensible ; enfin sur ce point, l’auteur arrive à cette conclusion neuve, dont nous citerons les termes : « Sous quelque point de vue que nous examinions l’influence des bonnes mœurs sur les lois présentes, absentes, bonnes, mauvaises, neuves ou surannées, cette influence est également admirable, également digne des plus sérieuses méditations de l’ami des hommes, du citoyen, de l’homme d’état, du législateur, du moraliste, du prince, de l’écrivain, du prêtre et du philosophe. » L’influence des mauvaises mœurs sur les lois devient à son tour l’objet des méditations de M. Matter. Il professe qu’elles altèrent les facultés morales et intellectuelles des peuples, que les lois sont mauvaises quand les mœurs le sont, que les mauvaises mœurs sapent par leur base les institutions politiques, qu’elles en corrompent les meilleures, qu’elles en font des corps sans vie et sans âme, qu’elles y glissent leur poison, et que toujours la ruine des lois, des empires suit la ruine des institutions et des mœurs. Après ces rares découvertes, l’auteur arrive à cette conclusion non moins originale : Que les bonnes mœurs inspirent et conservent les bonnes lois, réforment les mauvaises et les épurent, font prospérer les institutions et les empires ; que dans tous les temps aussi, les mauvaises mœurs altèrent les bonnes lois, corrompent les meilleures institutions, et mènent à leur ruine les peuples les plus célèbres, et que par conséquent la liaison des mœurs et des lois est intime. Mais l’influence des lois sur les mœurs semble à l’auteur plus difficile à déterminer que celle des mœurs sur les lois ; elle doit exister, elle existe, elle est attestée par l’histoire. Les lois générales et les institutions politiques des peuples exercent sur les mœurs leur influence. Un gouvernement démocratique tendra à rendre les mœurs démocratiques : un gouvernement aristocratique tendra à rendre les mœurs aristocratiques. De même pour la monarchie et la théocratie. Il n’est donc point de lois, conclut l’auteur, point d’institutions politiques dont l’influence morale ne soit digne à tous égards de l’attention du législateur et du moraliste ; Mais il est des circonstances qui déterminent et modifient l’influence des lois sur les mœurs ; d’abord cette action est plus forte en raison du caractère plus ou moins pur, et par conséquent plus