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REVUE. — CHRONIQUE.


ESSAI SUR L’HISTOIRE DES ARABES ET DES MORES D’ESPAGNE, PAR M. LOUIS VIARDOT. 2 Vol. in-8o[1].

Dans ces deux volumes pleins de faits et d’un ton historique parfaitement simple et naturel, M. Viardot nous a donné un récit complet de l’invasion et de la domination arabe en Espagne. Le gouvernement, la législation, les causes générales de progrès et de décadence, sont traitées à part et en dehors des évènemens dont on suit jusqu’au bout la série continue. M. Viardot, dans sa préface modeste, paraît craindre que cette séparation de la partie morale d’avec la partie matérielle de l’histoire, ne laisse quelque aridité à cette dernière : mais il n’en est pas ainsi. Ce narré simple, grave, sans divagation transcendante, ni tourment d’imagination, n’a pourtant pas la naïveté recherchée et artificielle d’une école de chroniques déjà oubliée : il se rattache plutôt à l’ancienne manière historique par sa direction régulière et le sens judicieux qui y préside. Ce n’est pas un livre d’éclat qu’a voulu jeter M. Viardot ; il n’a pas prétendu inventer un point de vue tout éblouissant, il ne crie pas lui-même à la découverte ; mais en étudiant l’ancienne histoire d’Espagne, il a été frappé de la grandeur et de l’influence civilisatrice des Mores ; il s’est épris d’intérêt pour ce peuple brillant et disparu ; il s’est appliqué à le rendre à la vie historique, en tirant, des chroniques et compilations antérieures, un ensemble clair et précis de tous les faits qui le concernent. Dans sa prédilection bien légitime pour cette noble race, il est un point toutefois où M. Viardot nous semble avoir un peu cédé de sa sévérité habituelle d’historien, et avoir par trop forcé la conjecture : c’est lorsque, remontant aux antiques Arabes, à ces pasteurs conquérans de l’Égypte, il essaie d’attribuer à leurs migrations les premiers germes heureux déposés aux rivages de Grèce. Il n’a pas tenu compte, dans cette opinion, des idées assez récentes de l’Allemagne sur l’invasion des peuplades indo-germaniques par le nord de la Thessalie, et l’explication ingénieuse qu’il tente s’applique au

  1. Paulin, place de la Bourse.