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ÉTUDES SUR L’ITALIE.

Comme trois cygnes blancs qui, sur un lac lointain,
Étalent leur plumage aux rayons du matin,
Ces trois îles, sortant de cette nuit profonde,
S’élèvent lentement sur l’écume de l’onde,
Et regardant les flots et le beau ciel vermeil,
Sèchent leur front humide à ce brûlant soleil.
Donc, pendant que la mer reluit, et que l’aurore
D’une teinte rosée enveloppe et colore
Les toits de pouzzolane, allez, et librement
Contemplez des hauts lieux ce grand enchantement.
Naples va s’éveiller, tout du port à la ville
Fermente ; autour de vous une race servile
Va surgir, et soudain, vous flairant étranger,
De gestes et de cris viendra vous assiéger : —
La vuole la barca ; gnor, la voiture est prête !
Clameurs à vous donner le vertige à la tête !
Vous, sans les regarder, et sourd à ce fracas,
Tout en les maudissant vous presserez le pas ;
Alors vous reviendra le souvenir de Rome,
La ville du silence et de la paix, où l’homme
Isolé, sans affaire et jamais agité,
Sur son antique sol marche avec dignité.


Cependant, au travers de cette immense foule
Qui se croise dans Naple et qui crie et qui roule,
Sur ce pavé poudreux, au milieu de ce bruit,
Quelquefois revenant, au tomber de la nuit,
De la fête de l’Arc ou bien de Carditelle,
Comme un ancien plaustrum passe une caratelle ;
Un jeune homme est devant, le corps ceint d’un lien
De pampres et coiffé du bonnet phrygien ;
Une femme d’Ischia, l’île blonde, aussi belle
Que la bonne déesse ou la grande Cybèle,
Repose sur le char, et d’un œil grave et doux
Regarde en appuyant ses mains sur ses genoux.
Or, à voir ce plaustrum et cette marche antique
Traverser lentement quelque place publique ;