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Une source atmosphérique fort curieuse existe dans les bois qui entourent le lac Laacher, et rappelle, quoique sur une échelle plus petite, la fameuse grotte du chien. C’est un dégagement souterrain d’acide carbonique, qui se fait jour silencieusement à travers le sol, et vient aboutir dans une espèce de fosse de deux à trois pieds de profondeur pratiquée dans la terre végétale au milieu des broussailles. Lorsque l’air est calme, la cavité se remplit presque uniquement d’acide carbonique, et il en résulte une asphyxie assez prompte pour les êtres qui viennent y respirer. Le fond du trou est couvert de débris ; les insectes et surtout les fourmis y arrivent en grand nombre pour chercher leur nourriture ; mais, privés d’air, ils y demeurent la plupart, et les oiseaux, à leur tour, apercevant l’appât trompeur, volent vers le piége, et y sont pris. Les bûcherons, connaissant fort bien cette manœuvre, visitent régulièrement l’endroit et tirent profit de cette chasse dont la nature fait tous les frais.

Près du volcan de Gerolstein, on trouve une caverne qui donne issue à un courant gazeux plus remarquable encore. Le gaz ne paraît pas différer notablement de l’air atmosphérique ; car on le respire sans éprouver aucun embarras. Sa vitesse est assez grande, et même hors de la caverne on sent l’impression du vent qui en sort. Il est froid et humide, et pendant tout l’été, il dépose sur les parois de la grotte une couche de glace fort épaisse qui en tapisse toutes les parties, et produit des effets d’un éclat et d’une transparence auxquels on pourrait appliquer sans trop d’exagération la description généralement consacrée par les voyageurs touristes aux grottes à stalactites.

Pendant l’hiver, le vent souterrain s’arrête et la glace cesse de se déposer.

Il est très probable, dit M. Reynaud, que la température si froide de ce courant d’air, à l’instant où il s’échappe du sein de la terre, est le résultat de l’expansion subite qu’il éprouve et indique par conséquent un état de compression antérieur. Ce phénomène est analogue à celui qui se passe dans la machine de Schemnitz. La présence dans l’intérieur de la terre d’un réservoir considérable d’air comprimé est un fait digne d’attention, et qui pourrait peut-être se rapporter à quelques cas particuliers de la théorie des puits artésiens. La suspension du courant pendant la saison froide tendrait même à faire croire que ce soufflet naturel est tout à fait analogue à une trompe hydraulique. Des courans d’eau naturels venant à tomber dans les cavernes intérieures qui doivent être nombreuses dans ce pays bouleversé par les volcans, entraînent dans leur chute de l’air atmosphérique qui se dégage dans les réservoirs souterrains avec une compression dépendant de la profondeur, et remonte à la surface par les ca-