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REVUE. — CHRONIQUE.

vention armée, préparée de si longue main dans la lutte constitutionnelle des petits états.

Cette intervention est imminente, elle fut stipulée dès 1820 dans l’acte final de Vienne, renouvelée plus précise et plus menaçante dans les résolutions de la diète du 28 juin 1832, ces résolutions qui ont institué une commission permanente de surveillance en face de toutes les assemblées législatives ; ces résolutions qui ont été comme un mot d’ordre donné à tous les princes, un signal de mort pour la presse, pour les associations et les fêtes nationales ; ces résolutions qui ont engagé entre les gouvernemens et les assemblées une lutte si vive et si passionnée, qu’aujourd’hui les princes n’ont plus recours qu’à leur droit de dissolution. Les états de Cassel ont été dissous deux fois en moins de huit mois.

Et dans l’attente d’un coup d’état si grave et si décisif, au moment où chaque courrier peut apporter la nouvelle de l’entrée des hulans et des grenadiers autrichiens dans Cassel, Francfort, Stuttgard, Carlsruhe, la nouvelle de la fermeture des chambres et de l’interruption des élections qui se préparent dans tous les états, n’est-ce pas une question bien opportune et bien légitime à se faire que de se demander si la vieille prudence des cabinets de Vienne et de Berlin n’est pas prête à faillir ? si nous ne touchons pas à une heure de crise solennelle où la jeunesse des peuples doit encore prendre au corps la vieillesse des monarques, et retourner contre eux, aveugles, l’arme que manie leur main débile et tremblante ?

Certes il serait téméraire d’affirmer que le contre-coup d’une explosion centrale doive ébranler subitement les provinces compactes des deux monarchies du Nord et du Sud ; mais il est permis de prévoir que ce libéralisme nouveau dont M. de Rotteck est l’interprète à Bade, et MM. Jordan et Pfeiffer, à Cassel, ce libéralisme, religion de l’unité démocratique de l’Allemagne, qui a son prosélytisme, sa poésie, ses journalistes-martyrs, son drapeau et sa fédération, ne saurait être étouffé et anéanti sous des mesures de violence, et qu’il pourra bien remonter par les trouées que les baïonnettes impériales et royales auront faites pour venir jusqu’à lui et s’étendre insensiblement jusqu’aux capitales même où règne la main qui les dirige.

La solennité de Hambach, qui fut, comme on sait, la cause initiale des rigueurs de la diète et de la courageuse opposition des états, aurait-elle été en effet le signal et la prophétie d’une ère de régénération universelle pour l’Allemagne ? Où sont, et que pensent et que disent aujourd’hui les trente mille fédérés accourus de tous les royaumes et de toutes les principautés, Hessois, Badois, Bavarois, Saxons, Wurtembourgeois, s’embrassant au milieu des discours ; des orateurs, au bruit de la Marseillaise et des chants de délivrance de la Pologne, et inscrivant sur leur