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REVUE. — CHRONIQUE.

années pour le Jardin des Plantes, et que l’on savait malade à Bombay. Ce malheureux évènement ne peut tarder à se confirmer.


Les journaux ont annoncé dernièrement un fait assez singulier. L’Angleterre, dit-on, vient de prendre possession des îles Malouines que les provinces de la Plata ont toujours considéré comme leur appartenant en qualité d’héritières de tout ce que possédait l’Espagne dans cette partie de l’Amérique. Or l’Espagne était devenue propriétaire unique de ces îles depuis l’achat fait en 1767 de la petite colonie que nous avions fondée au Port-Louis, et la destruction en 1770 de l’établissement anglais du Port-Egmont. Buenos-Ayres, de son côté, a fait acte de souveraineté sur ces îles en donnant à divers individus la permission d’aller chasser le bétail sauvage qui y existe ; et sous l’administration de M. Rivadavia, un plan avait été formé pour les coloniser. Si les circonstances n’ont pas encore permis de réaliser ce projet, et si les îles Malouines sont toujours désertes, ce n’est pas une raison pour que l’Angleterre s’en empare en pleine paix. Du reste, elle s’est fort peu gênée de tout temps avec Buenos-Ayres ; jusqu’en 1827, elle envoyait ses navires tuer les loups marins à l’embouchure de la Plata, aux portes de Montevideo. Un de ces bâtimens, pris en flagrant délit un peu au nord du cap Sainte-Marie, ayant été saisi par un navire de guerre buenos-ayrien, l’ambassadeur anglais, lord Ponsomby, et le consul-général, M. Woodbine Parish, se récrièrent et exigèrent du gouvernement que le capitaine capteur fût jugé par un conseil de guerre. Le prétendu coupable fut absous ; mais ce n’était pas moins un abus de la force, pareil à celui dont je parle en ce moment.


Un mot maintenant sur quelques publications nouvelles :


Bellegarde ou l’Enfant canadien adopté[1] est un roman traduit de l’anglais, qui, nous dit-on, a eu du succès dans sa patrie. C’est sans doute ce qui a engagé M. Philarète Chasles à l’ajouter à la masse de nos romans indigènes. N’en déplaise cependant à nos voisins et à la trop courte préface du spirituel traducteur, je vois là tout simplement un beau sujet manqué. Il s’agissait de nous peindre le Canada, n’est-il pas vrai ? Or, qu’est-ce que le Canada ? Nous autres Français, race insouciante des choses lointaines, à peine nous souvenons-nous que le fatal traité de 1763 nous en a dépouillés en faveur de l’Angleterre. Nous ignorons presque complètement que là il existe une population entière française d’origine, de religion, de langage, de mœurs, une population qui veut rester française en dépit de ses vainqueurs, et qui, depuis soixante-dix ans, leur oppose une

  1. Chez Gosselin.