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HISTOIRE DES ANCIENS PEUPLES ITALIENS.

allait, conduite par l’un des principaux membres de l’ordre sacerdotal, chercher ailleurs d’autres foyers. La religion les protégeait mieux que les armes. « Partout, dit M. Micali, où l’on bâtissait un temple avec de nouveaux autels et des rites divins, les peuples se rassemblaient autour ; là s’élevaient des habitations rustiques, s’ouvrait un nouveau marché ; là sur une terre nouvelle croissait un peuple nouveau. Ainsi, selon le génie de ces temps où dominait universellement le sacerdoce, tous tenaient pour sacré le commencement de ces colonies, qui propageaient de côté et d’autre les formes, les ordonnances et la tutelle d’une même institution théocratique : tous mieux contenus ou plus justement régis par elle, s’estimaient heureux d’être associés au sort d’un peuple favorisé par les augures et cher aux dieux. Ce qui fait clairement comprendre comment un petit nombre d’hommes choisis, revêtus des armes invincibles de leur dieu, purent s’incorporer avec d’autres peuples indépendans, leur communiquer leurs lois, leurs règles, et fonder avec le temps des sociétés puissantes. Initiés aux mystères religieux et civils, les conducteurs de ces colonies sacrées ne pouvaient certainement donner au nouveau peuple d’autres institutions que celles dont ils étaient les gardiens, les régulateurs et les maîtres. Nous apprenons de Pline que les Picéniens descendaient des Sabins par le vœu d’un printemps sacré ; les Samnites en provenaient de la même manière, comme les Lucaniens des Samnites : toutes nations nombreuses et fortes, constituées sous une seule loi, ayant la même religion, et gouvernées également dès l’origine par des commandemens et des décrets sacerdotaux[1] ».

Les diverses peuplades de race certainement osque, séparées par la nature même du sol coupé en vallées profondes et difficilement accessibles, avaient habituellement peu de relations entre elles, ce qui contribua sans doute à conserver et à fortifier l’esprit d’indépendance qui formait, comme le remarque Salluste[2], le trait le plus marqué de leur caractère commun. Jamais elles ne parvinrent

  1. Tome i, page 24.
  2. Genus hominum agreste sine legibus, sine imperio, liberum atque solutum. Catil. 6.