Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 2.djvu/368

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
362
REVUE DES DEUX MONDES.

habitans. Mais bientôt après les Ombriens furent à leur tour dépossédés par les Ra-Sènes, qui jetèrent au centre de l’Italie les bases d’une domination durable.

Secondement, les guerres intérieures. Tant de petites peuplades voisines, resserrées chacune dans un étroit espace, ne pouvaient guère vivre long-temps en paix, et la force qui, presque toujours, intervenait pour terminer entre elles les contestations sur les limites, devait les changer souvent. Les Étrusques étendirent progressivement les leurs de l’embouchure de la Magra à celle du Tibre, et portant leurs conquêtes dans la haute Italie jusqu’aux rives du Tésin, et dans l’Italie inférieure, au-delà même de celles du Vulturne, ils y fondèrent deux nouveaux états, deux Étruries nouvelles, composées chacune, comme l’ancienne, de douze villes confédérées ; car le nombre douze était chez les Ra-Sènes symbolique et sacré. Et encore ici nous voyons les Étrusques constamment séparés de tous les autres peuples italiques par une forme de société qui, dans son ensemble et dans ses détails, leur était exclusivement propre.

Troisièmement, les colonies appelées Printemps sacrés. Lorsque l’agriculture, à peine naissante, n’ajoutait que peu de ressources à celles de la vie purement pastorale, la subsistance des tribus errantes dans les vallées des Apennins était généralement très précaire. S’il arrivait que leurs faibles moissons manquassent, ou qu’une épidémie ravageât leurs troupeaux, ou qu’elles eussent éprouvé les calamités de la guerre, alors, pour détourner par une solennelle expiation la colère céleste, elles consacraient au dieu à qui appartient le souverain empire, tout ce qui naissait dans le cours d’un printemps, enfans et animaux, et c’était là le printemps sacré, ver sacrum. Il est possible qu’originairement ce qu’on dévouait ainsi fût réellement offert en sacrifice à la divinité qu’on voulait fléchir, comme le pense M. Micali. Cependant j’inclinerais à ne voir dans cette institution singulière qu’un moyen tout-à-fait conforme au génie religieux de l’antiquité, de remédier au trop grand accroissement de la population par l’établissement de colonies qui trouvaient dans le caractère sacré qu’on leur avait imprimé une sauvegarde plus sûre que la force. Et, en effet, sitôt que la génération dévouée avait atteint l’âge de l’adolescence, elle s’en