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ses lèvres et qu’on jette par-dessus son épaule. Une femme ! c’est une partie de plaisir ! Ne pourrait-on pas dire quand on en rencontre une : Voilà une belle nuit qui passe ? Et ne serait-ce pas un grand écolier en de telles matières, que celui qui baisserait les yeux devant elle, qui se dirait tout bas ; « Voilà peut-être le bonheur d’une vie entière, » et qui la laisserait passer ? (Elle sort.)

OCTAVE, seul.

Tra, tra, poum ! poum ! tra deri la la. Quelle drôle de petite femme ! Hai ! holà ! (Il frappe à une auberge.) Apportez-moi ici, sous cette tonnelle, une bouteille de quelque chose.

LE GARÇON.

Ce qui vous plaira, excellence. Voulez-vous du lacryma-christi ?

OCTAVE.

Soit, soit. Allez-vous-en un peu chercher dans les rues d’alentour le seigneur Cœlio, qui porte un manteau noir et des culottes plus noires encore. Vous lui direz qu’un de ses amis est là, qui boit tout seul du lacryma-christi. Après quoi, vous irez à la grande place, et vous m’apporterez une certaine Rosalinde qui est rousse et qui est toujours à sa fenêtre.

(Le garçon sort.)

Je ne sais ce que j’ai dans la gorge ; je suis triste comme une procession. (Buvant.) Je ferai aussi bien de dîner ici ; voilà le jour qui baisse. Drig ! drig ! quel ennui que ces vêpres ! est-ce que j’ai envie de dormir ? Je me sens tout pétrifié.

(Entrent Claudio et Tibia.)

Cousin Claudio, vous êtes un beau juge ; où allez-vous si couramment ?

CLAUDIO.

Qu’entendez-vous par-là, seigneur Octave ?

OCTAVE.

J’entends que vous êtes un magistrat qui a de belles formes.

CLAUDIO.

De langage, ou de complexion ?

OCTAVE.

De langage, de langage. Votre perruque est pleine d’éloquence, et vos jambes sont deux charmantes parenthèses.