Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
142
REVUE DES DEUX MONDES.

retrouver les traces chez les Bas-Bretons de France. On ne peut nier un fait très singulier, c’est que le langage de la Basse-Bretagne et celui du pays de Galles ont de tels rapports, que les habitans des deux pays s’entendent sans difficulté, tandis qu’il n’y a pas la plus légère analogie entre le langage du pays de Galles et celui des autres provinces anglaises. Un autre fait non moins digne de remarque, est que la langue welche, ou galloise, ou cambrienne, s’est conservée jusqu’aujourd’hui dans toute sa pureté, et que le pays de Galles possède encore des poètes qui écrivent dans cette langue avec facilité.

La musique du pays de Galles a la même originalité que la poésie, soit sous le rapport des formes de son chant, soit sous ceux du rhythme et du mode d’exécution, soit enfin sous ceux de la forme des instrumens et de la manière d’en moduler les accords. La plupart des pièces de chant des Gallois sont des stances qu’ils nomment pennillons.

Je ne connais rien dans la musique d’aucun peuple moderne qui puisse donner l’idée du chant de ces pennillons ; il faut l’avoir entendu pour en avoir quelques notions ; car l’effet de ce chant dépend autant de la manière dont il est exécuté que de la composition. Les pennillons sont fort difficiles à chanter, parce que le chanteur est obligé de suivre l’accompagnateur, qui module de fantaisie sur sa harpe welche, et qui s’arrête dans le ton qui lui plaît. Il faut que la voix puisse suivre ses modulations sans changer le caractère de l’air. C’est à cause de cette difficulté que le chanteur ne commence presque jamais les couplets avec le premier temps de la mesure, afin de pouvoir juger le ton ; c’est au second ou au troisième temps qu’il commence ordinairement. Un bon chanteur est aussi capable d’adapter des vers de mesures très différentes à la même mélodie, et cependant pas un n’a la plus légère notion des règles de la musique. Aucun de leurs chants n’est écrit ; tout est de tradition chez eux, mais leur intelligence est parfaite.

Deux instrumens sont particuliers au pays de Galles : l’un est la harpe à triple rang de cordes ; l’autre est une espèce de viole d’une forme très bizarre, qu’on appelle cruth. Je n’ai pas besoin de dire que la harpe welche ou cambrienne n’a point de pédales ; cependant elle est pourvue de demi-tons, comme nos harpes modernes, au moyen