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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/692

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LA CORNOUAILLE.

§. i.
Aspect du pays. — Carrhaix ; Penmarc’h.


La Cornouaille est la portion la plus montagneuse et la plus variée de l’Armorique. Rien de sauvage comme son aspect au nord, rien de suave comme certains cantons du midi. Pour la juger sous la première de ses formes et se faire une juste idée de son aridité, il faut voir, au milieu de l’été, ses longues routes blanches et raboteuses courant aux flancs des montagnes noires ou des chaînes d’arès ; ses troupeaux de moutons bruns semés sur les bruyères en fleurs, ses pâtres immobiles au sommet des rochers, jetant au vent leurs refrains monotones, et son ciel gris, immobile, qui vous envoie sa sèche et dévorante chaleur au fond de la poitrine, et vous fait suer et râler comme aux dunes des colonies indiennes. La route de Morlaix à Pontivy, à travers les montagnes, est une des plus tristes et des plus fatigantes qu’il soit possible de parcourir. C’est partout une mer d’ajoncs, de genêts, de bruyères, d’où s’élève à peine, de temps en temps, un îlot de verdure que protègent quelques arbres et où se cache une pauvre chaumière. — À droite, à gauche, devant, derrière, solitude et abandon ! Personne sur la route, personne aux champs ; si ce n’est parfois un enfant aux longs cheveux, au teint hâve et aux yeux ardens, qui vous regarde passer du haut d’un fossé, une baguette blanche à la main. Ce n’est qu’en approchant de Carrhaix que l’on rencontre quelques voyageurs. Vers le soir, surtout, vous voyez passer, un à un, des hommes à figure de cadavre, une ceinture de cuir autour du corps, une