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Cependant, vers onze heures du soir, lorsque la ville, fatiguée de ses longues agitations du jour, succombant de sommeil, laissait s’éteindre partout ses lumières et commençait à s’endormir, les cloches, s’ébranlant tout à coup et sonnant le tocsin, réveillèrent en sursaut les paroisses de San-Salvador et de Santa-Maria.

Je traversais dans ce moment la Puerta del Sol. —

— Fuego ! — fuego ! — au feu ! — au feu ! — criait-on dans le lointain, du côté de la Plaza Mayor ; — et d’épais nuages d’une fumée pleine d’étincelles montaient en tourbillonnant au-dessus des clochers du couvent de San-Felipe el Real ; — et toute la façade du palais d’Onâte s’éclairait d’une vaste lueur rougeâtre.

Je ne doutai pas d’abord que ce ne fût le cirque des taureaux qui fût devenu la proie d’un effroyable incendie. — Je courus vers les piliers de Guadalaxara. — La réverbération des flammes m’avait trompé sur leur distance. — Le feu venait de plus loin. — Je descendis la rue Mayor jusqu’à la place de la Villa.

C’était là. — C’était le temple gréco-gothique construit autour de la Minerve-Fontaine, qui brûlait, — et qui brûlait aussi joyeusement que peut brûler un temple de bois de sapin et de toile peinte.

Ce fragile monument ! — il n’avait pas même su durer autant que les fêtes en l’honneur desquelles il avait été bâti ! — ce n’était

    « Enfin, on m’annonce ce soir un courrier qui s’en va par l’Aragon et la Catalogne ; j’en profite à tout hasard, et je vous expédie ce que j’ai recopié et le manuscrit du reste.

    « Nous sommes maintenant sans communications à peu près avec la France ; presque aucune lettre n’arrive depuis un mois, et nos dépêches n’ont probablement pas meilleure chance.

    « J’ai reçu pourtant votre billet du 1er octobre…

    « Si nous sortons du chaos où nous sommes, je tâcherai de faire ce que vous me demandez, et de vous écrire quelques lettres sur nos affaires ; mais, pour Dieu, attendez que la correspondance redevienne possible. À quoi bon maintenant noircir du papier qui ne sert qu’aux cigarritos de MM. les Biscayens et du curé Merino ?

    « Nous avons eu dimanche ici notre petite émeute et nos coups de fusil ; cela s’est terminé par le désarmement des volontaires royalistes. Je vous conterai cela plus au long ; c’était curieux. »