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LITTÉRATURE ANGLAISE.

Sir John Malcolm. — La vie de cet écrivain n’est pas moins intéressante que ses ouvrages. Très jeune, il partit pour l’Inde ; et du grade de sous-lieutenant il ne tarda pas à s’élever, à force de courage, de patience et d’activité, aux premiers rangs de l’armée ; ses études sanskrites marchaient de front avec ses exploits militaires et ses négociations diplomatiques. Ambassadeur, tacticien, poète, orientaliste, un mérite spécial lui permettait de tirer parti de circonstances si favorables ; c’était un observateur attentif qui ne laissait échapper aucun détail, un philosophe qui rapportait tous ses résultats à un point central, à une pensée première. Armé d’un crayon et d’un album, il parcourait toute l’Inde et toute la Perse, recueillant des notes, prenant acte de tous ses souvenirs et de tout ce qui se passait sous ses yeux, écoutant les sages du pays, prêtant l’oreille même aux passans et aux femmes, ne dédaignant rien de ce qui pouvait éclairer des régions si mal connues de l’Europe. Enfin plus de soixante volumes in-8o, remplis de ces documens, furent le résultat de ses recherches assidues et de ses travaux constans. Personne ne nous fait mieux comprendre que lui la civilisation bizarre de l’Asie ; il n’a pas négligé les traditions, les légendes, les fables que la crédulité de ces peuples admet parmi les témoignages les plus vénérables et les plus respectés.

Il a bien raison de dire dans sa préface de l’histoire de la Perse, que sans la connaissance des traditions populaires, il est impossible d’arriver à celle de l’état social d’un peuple. « Ce sont elles, ajoute-t-il, qui ca-

    Commonwealth, par Godwin, est un chef-d’œuvre de recherches, d’érudition, de jugement, d’impartialité. L’Histoire d’Angleterre, par Brodie, mérite aussi des éloges, quoique les passions du parti whig l’aient marquée d’une empreinte beaucoup trop vive. Un des historiens anglais qui ont exercé le plus d’influence sur leur époque et sur les opinions modernes, est John Mitford, auteur de cette histoire de la Grèce que lord Byron ne cessait de relire, et qui, en butte à beaucoup d’attaques, n’en est pas moins le seul tableau vrai de l’Hellénie antique. Mitford a un immense mérite, celui d’avoir dissipé le nuage pédantesque dont les souvenirs d’Athènes et de Sparte s’environnaient, de nous avoir fait pénétrer dans l’intérieur de ces petites républiques si héroïques et si barbares à la fois, maîtresses féroces et capricieuses d’un peuple d’esclaves qu’elles égorgeaient à plaisir, et dont la sueur procurait aux citoyens de l’Hellénie toutes les nécessités de l’existence, toutes les richesses du commerce. On a reproché à Mitford d’avoir calomnié les républiques grecques. Nous ne pensons pas qu’après les jugemens faux et les peintures romanesques dont tous les livres de nos écoles ont été remplis, la sévérité de ce jugement puisse être dangereuse ; c’est bien plutôt un contre-poison à tant d’erreurs. Elle nous apprend à regarder ces citoyens de