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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 1.djvu/63

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FANTASIO.

sein que celui de dormir. Maintenant, la voilà qui pleure, et qui ne se doute guère que je la vois encore. Ah ! si j’étais un écolier de rhétorique, comme je réfléchirais profondément sur cette misère couronnée, sur cette pauvre brebis à qui on met un ruban rose au cou pour la mener à la boucherie ! Cette petite fille est sans doute romanesque, il lui est cruel d’épouser un homme qu’elle ne connaît pas. Cependant elle se sacrifie en silence ; que le hasard est capricieux ! il faut que je me grise, que je rencontre l’enterrement de Saint-Jean, que je prenne son costume et sa place, que je fasse enfin la plus grande folie de la terre, pour venir voir tomber, à travers cette glace, les deux seules larmes que cette enfant versera peut-être sur son triste voile de fiancée !

(Il sort.)



Scène IV.

(Une allée du jardin.)
LE PRINCE, MARINONI.
LE PRINCE.

Tu n’es qu’un sot, colonel.

MARINONI.

Votre altesse se trompe sur mon compte de la manière la plus pénible.

LE PRINCE.

Tu es un maître butor. Ne pouvais-tu pas empêcher cela ? Je te confie le plus grand projet qui se soit enfanté depuis une suite d’années incalculable, et toi, mon meilleur ami, mon plus fidèle serviteur, tu entasses bêtises sur bêtises. Non, non, tu as beau dire ; cela n’est point pardonnable.

MARINONI.

Comment pouvais-je empêcher votre altesse de s’attirer les désagrémens qui sont la suite nécessaire du rôle supposé qu’elle joue ? Vous m’ordonnez de prendre votre nom, et de me comporter en véritable prince de Mantoue. Puis-je empêcher le roi de Bavière de faire un affront à mon aide-de-camp ? vous aviez tort de vous mêler de nos affaires.