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COSMOGRAPHIE.

coupé par moitié longitudinalement, ce qui revient encore à peu près au même.

Il existe dans ce système un autre trait qui est inséparable des idées sur la forme du monde et sur les mouvemens des astres, et qui, en conséquence, n’a pu manquer de se trouver aussi dans celui de Diodore de Tarse, de Sevérianus de Gabala et de Théodore de Mopsueste. C’est l’élévation progressive de la terre depuis le midi jusqu’au nord, et de la grande montagne derrière laquelle les astres se cachent tous les soirs. Jean Philoponus fait une courte mention de cette opinion singulière : « Quant à ce que prétendent quelques-uns, dit-il, que le soleil retourne vers l’orient, en passant le long des régions boréales, et derrière de très grandes montagnes qui le cachent, c’est une ancienne opinion absurde et ridicule[1]. » Voilà probablement ce qu’en pensaient tous ceux qui avaient quelque teinture des sciences physiques ; mais nous avons dit que parmi les auteurs chrétiens de cette époque beaucoup y étaient tout-à-fait étrangers ; aussi, bien loin d’avoir rejeté cette opinion comme ridicule, ils l’avaient accueillie dans leurs systèmes comme orthodoxe. L’anonyme de Ravenne, dans sa Cosmographie, écrite à la fin du viie siècle ou au commencement du viiie, et qui n’est qu’une mauvaise traduction d’un livre grec, admet aussi que la terre est plate : selon lui, le soleil la parcourt dans l’espace de douze heures ; à la première, il se trouve au-dessus des Indiens ; à la deuxième, au-dessus des Perses, et ainsi de suite jusqu’à la douzième, où il atteint le point du ciel correspondant aux Bretons et aux Scotes[2] : et ce qui prouve, selon l’anonyme, que la terre est plate, c’est que chaque point de la terre voit le soleil pendant douze heures[3]. Il existe, dans la partie septentrionale de la terre, des montagnes derrière lesquelles cet astre se cache tous les soirs[4] ; et si personne n’a jamais vu ces montagnes, ajoute-t-il prudemment, c’est que Dieu

  1. J. Philopon., de Creat. Mundi, iii, 10, p. 124, 125.
  2. Anon. Ravenn. i, 2, 3.
  3. id. i, 4.
  4. id. i, 9, p. 21, 22.