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n’a pas voulu qu’on les vît[1]. Voilà une de ces raisons qui dispensent de toutes les autres. Le Deus ex machinâ était un moyen d’explication qu’on tenait en réserve pour toutes les occasions difficiles. On en faisait usage, par exemple, pour rendre compte de la suspension de la terre dans l’espace. Ceux des chrétiens qui persistaient, comme Jean Philoponus, à croire que l’Écriture n’était point contraire au système de Ptolémée, expliquaient avec facilité, dans leur sens, les textes de l’Écriture : Deus fundavit terram super stabilitatem suam[2], et surtout : Deus appendit terram super nihilum[3]. Ils y voyaient la suspension de la terre, telle que l’entendaient Platon, Aristote et Ptolémée, c’est-à-dire l’équilibre et l’immobilité d’une sphère, également sollicitée de toutes parts. Mais ceux-là qui assuraient que la terre est plate comme une table, et qu’elle soutient le poids des cieux, étaient fort embarrassés de savoir ce qui la soutenait elle-même. Ils se tiraient d’embarras en affirmant, d’après les mêmes textes, que si la terre se soutenait toute seule dans l’espace, c’est que Dieu le voulait ainsi[4]. Solution qui ne laissait pas le plus petit mot à dire aux adversaires.

La même théorie que celle de Cosmas est exposée dans un fragment inédit sur le ciel, la lune, le temps et les jours, dont il est assez difficile de dire quel est l’auteur. On y voit que le ciel est comme une peau étendue sur l’univers, en forme de voûte, conformément aux paroles de Daniel et d’Isaïe ; que la terre a la figure d’un cône ou d’une toupie, en sorte que sa surface va en s’élevant du midi au nord ; à la partie septentrionale est la sommité du cône, derrière laquelle le soleil se cache pendant la nuit[5], ce qui revient assez exactement à la théorie de Cosmas ou de l’anonyme de Ravenne, et des auteurs chrétiens que critique Jean Philoponus.

On connaît le texte de l’Ecclésiaste[6] : Oritur sol et occidit, et

  1. id. i, 10, p. 23.
  2. Psalm. ciii, 5.
  3. Job. xxvi, 7.
  4. Auctor Quœst. et resp. ad orth. 130, p. 481, A. — Nullisque fulcris, sed divinâ potentiâ sustentatur. Vinc. Bellov. vi, 4, p. 372, c.
  5. Cod. Bibl. Reg. no 854, fo 193, ro.
  6. i, 5.