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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 2.djvu/126

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glie voulut bien reconnaître le droit, mais en affichant toutes sortes de mépris pour ces droits qui ne sont que des embarras pour les pouvoirs. M. Barthe, le moins innocent des ministres en matière d’association, alla plus loin ; il déclara que le droit n’existait pas, puisqu’il n’est pas mentionné dans la charte, et le ministre du commerce employa tout son esprit à prouver que la restauration étant tombée parce qu’elle avait souffert des associations politiques, il était du droit et du devoir du gouvernement d’empêcher toute association. Un autre amendement, rejeté comme celui de M. Bérenger, força le ministère à déclarer qu’il voulait non-seulement avoir sous sa main les associations politiques, mais les associations littéraires, religieuses, industrielles. Un troisième ou quatrième amendement limitait la durée de la loi ; pour le repousser, il fallut bien déclarer en outre qu’on avait dessein de supprimer à jamais le droit de s’associer ; enfin, M. Persil termina cette longue comédie en faisant savoir à la chambre que les sociétés pour la fondation des journaux seraient également atteintes par la loi nouvelle. Il paraît que la liberté de la presse n’est aussi qu’une théorie, et non un principe dans le gouvernement représentatif tel qu’on nous le fait aujourd’hui. Cent cinquante-quatre boules noires ont protesté contre cette loi qui imposera au ministère des nécessités auxquelles il se soustraira difficilement.

M. Barthe et M. d’Argout, qui étaient sortis un peu froissés de cette discussion, ont eu à lutter, pendant quelques jours, contre une petite intrigue ministérielle qui tendait à les séparer du cabinet. M. Barthe surtout était complètement sacrifié par ses collègues, qui se plaignaient de l’embarras que leur causait à la chambre sa qualité d’ancien carbonaro, dont cherche vainement à se débarrasser M. le garde-des-sceaux. L’affaire s’est arrangée cependant, grâce à de hautes influences, et maintenant le ministère est plus uni que jamais.

On parle cependant de la retraite de M. le duc de Broglie ; mais c’est M. de Broglie lui-même qui la sollicite, dit-on. Le découragement qui perce dans tous les discours du ministre des affaires étrangères, nous autorise à regarder ces bruits comme fondés. Il serait question de le remplacer par M. de Sainte-Aulaire ; celui-ci serait remplacé à Vienne par M. de Rayneval, qui a déjà occupé ce poste diplomatique sous M. de Polignac. La nomination de M. de Sainte-Aulaire aux affaires étrangères indiquerait presque le successeur qui serait donné à M. de Talleyrand, dont l’esprit et le corps sont, dit-on, très affaiblis en ce moment.

Lord Durham réussit peu à Paris. On le trouve trop froid, trop fier, trop dandy ; on va même jusqu’à lui reprocher la belle figure qu’il apporte avec tant de confidence dans les salons, et on entend dire aux uns qu’il a