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REVUE DES DEUX MONDES.

Pétersbourg, une faible notice en langue arménienne, qui fut traduite à Paris par M. Le Vaillant de Florival, professeur d’arménien à l’école des langues orientales ; mais, ni l’éditeur de Saint-Pétersbourg, ni le traducteur français, n’ont connu la source première de cet ouvrage. »

M. de Hammer termine cette longue et curieuse préface, dont je n’ai cité que quelques fragmens, par une biographie du poète Fasli, qui commença sa carrière poétique en 1530, devint secrétaire du divan, et termina en 1560, deux ans avant sa mort, son épopée de la Rose et du Rossignol.

Le poème s’ouvre par les louanges de Dieu et de Mahomet. C’est de l’ode et de l’élégie. Le poète accuse ses fautes et en demande pardon au ciel ; il dépeint les illusions qui l’ont trompé, le monde qui l’a séduit pour le laisser ensuite dans les tristesses de cœur. Il implore le secours du prophète ; puis arrive l’épopée qu’il entreprend, et la description de la rose qui en est l’héroïne. La rose est la beauté par excellence, la douceur et la grâce ; le printemps lui sert de maître ; les autres fleurs l’entourent avec respect, et sont fières d’être ses compagnes ; le matin lui présente un miroir de rosée dans lequel elle se contemple avec orgueil. Le rossignol entend parler de cette merveilleuse beauté et en devient amoureux. Alors nuit et jour il se plaint, nuit et jour il l’appelle ; il erre de tous côtés et ne la trouve pas ; il revient triste dans les bois et y fait entendre de douloureux gémissemens. Enfin un fleuve lui indique le chemin de la ville où demeure cette belle rose. Le rossignol accourt, et quand il a vu celle qu’il ne faisait encore que rêver, son amour redouble, et ses plaintes deviennent plus amères. Sans cesse il voltige autour d’elle, sans cesse il implore sa pitié. Il s’adresse aux bois, au vent, à la lune ; puis, quand il voit que ni le soleil ni la lune n’adoucissent ses peines, il se tourne vers Dieu et le supplie par la beauté de sa bien-aimée, par la clarté des étoiles et la magnificence du jour, par Adam et Noë, par Jésus et Marie, il le supplie d’avoir compassion de lui, et de lui rendre le repos.

Cependant la rose a entendu les chants d’amour du rossignol, et quoiqu’elle en soit flattée intérieurement, elle le traite avec tout l’orgueil aristocratique d’une noble princesse, et toute la fierté dédaigneuse d’une belle femme. Pour comble de malheur, le narcisse est devenu l’ennemi du pauvre rossignol ; il le calomnie auprès de l’épine ; l’épine en fait son rapport à la rose ; et celle-ci, dans un premier mouvement de colère, demande au Shah du printemps l’incarcération de cet insolent amoureux, et deux jours après le rossignol est mis en cage pour pleurer, maigrir et se désespérer tout à son aise.

Bientôt de graves événemens viennent distraire de cette histoire les