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REVUE. — CHRONIQUE.

habitans de la ville ; la guerre éclate, et pendant les longues anxiétés qu’elle traîne à sa suite, la rose fait de sérieuses réflexions ; elle songe à l’amour si profond et à la constance si mal récompensée de son rossignol. Elle s’informe de lui, et apprend qu’il est dangereusement malade. Elle lui envoie un de ses amis, le zéphir, pour le consoler, et tout ce que le zéphir raconte des longues souffrances et de la dure captivité du rossignol la touche jusqu’aux larmes. Elle veut aller le voir elle-même ; elle arrive, et son amant pense mourir de joie en l’apercevant. Enfin elle l’aime ; elle demande qu’il soit remis en liberté, et l’épouse. Les noces se font d’une manière splendide. Le cyprès est chargé de couvrir le sol d’un tapis vert ; la tulipe doit fournir le vin ; le narcisse présente la coupe aux convives, tandis que le lis avec son épée monte la garde à la porte de la salle. Alors viennent les jeux et les danses, avec les chants de joie et les castagnettes. La rose cherche le souffle du rossignol ; le rossignol repose sa tête sur le sein de sa bien-aimée. Puis après cette nuit d’amour et de félicité, la rose pâlit, chancelle, se défeuille et meurt.

Telle est cette épopée variée, pittoresque, intéressante, chargée de couleurs, riche d’images, cette épopée qui a bien de quoi exercer l’esprit des interprètes et des commentateurs, et que l’on peut lire aussi comme un roman d’amour transporté hors du terrain habituel, et conduit par d’autres personnages.

M. de Hammer nous dit que sa traduction est littérale et fidèle, et, comme il n’est pas en mon pouvoir de la vérifier, je le crois volontiers sur parole. Le savant philologue a d’ailleurs fait dans sa vie assez d’autres choses plus difficiles et plus surprenantes, pour qu’on ne lui conteste pas celle-ci.


Briefwechsel zwischen Goethe und Zelter (Correspondance entre Goethe et Zelter de 1796 à 1832


On avait annoncé depuis long-temps cette correspondance. On savait que Goëthe lui-même y attachait une grande importance ; car, plusieurs années avant sa mort, il avait pris soin de la recueillir, de la faire copier et de la mettre en ordre. C’était pour tous les hommes lettrés de l’Allemagne un curieux sujet de conjectures que ces lettres échangées entre le poète de Weimar et le directeur de l’académie de chant de Berlin ; ces lettres de l’homme qui trônait comme un roi, et du pauvre manœuvre qui, par un instinct naturel, et à force de travail et de patience, s’était élevé au rang d’artiste, sans cesser d’être maçon. Puis le libraire a payé très cher le manuscrit, puis les trois premiers volumes ont paru, et l’espoir du public a été, on peut le dire, presque totalement trompé.