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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 3.djvu/124

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REVUE DES DEUX MONDES.

au moral, qui reprend sa puissance raisonnée sur le physique ; il est vrai que parfois ce second mouvement est chez moi plus douloureux que le premier, et que je souffre plus encore du calme que du bouleversement.

Je me levai donc d’un air parfaitement tranquille, et je m’avançai de nouveau vers le précipice dont la vue avait produit en moi l’effet que j’ai essayé de décrire. Un petit sentier, large de deux pieds et demi, se présentait, je le pris d’un pas en apparence aussi ferme que celui de mon guide ; seulement, de peur que mes dents ne se brisassent les unes contre les autres, je mis dans ma bouche un coin de mon mouchoir replié vingt fois sur lui-même.

Je descendis deux heures en zig-zag, ayant toujours, tantôt à ma droite, tantôt à ma gauche, un précipice à pic, et j’arrivai sans avoir prononcé une seule parole au village de Louëche.

— Eh bien ! me dit Willer, vous voyez bien que ce n’est rien du tout.

Je tirai mon mouchoir de ma bouche et je le lui montrai ; le tissu était coupé comme avec un rasoir.

Alex. Dumas.