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POÉSIES POPULAIRES DE LA BASSE-BRETAGNE.

un dénouement à son roman. Un poète breton pouvait seul prendre pour sujet cette donnée triviale à force d’être vraie. Aussi, je l’ai déjà dit, ce n’est point un livre qu’il a fait : il a écrit simplement son ame ; mais les détails tendres et ingénieux, les mouvemens passionnés, les tristesses contagieuses abondent dans cette œuvre intime et sincère.

Le début des Aventures d’un jeune Breton est comme de coutume un appel aux auditeurs ;

— Approchez, jeunes gens qui formez des affections ; écoutez comment ces affections commencent et puis tombent à jamais ; écoutez, car, moi, je suis un jeune homme qui avait noué un bel amour, — un bel amour dont il ne me reste rien aujourd’hui !

Si l’on m’avait dit, il y a onze mois : — Tu tomberas dans les chaînes des jeunes filles, — j’aurais répondu avec dédain : — Moi prisonnier d’une femme !…

Eh bien ! mes jeunes frères, j’ai été dans leur prison, et les liens de l’amour sont venus enchaîner jusqu’à mon cœur, et j’étais dans une joie, dans un enivrement ineffable ; — les jeunes filles sont de doux geôliers !

Les geôliers sont cruels et durs pour leurs prisonniers, et ils leur donnent un lit de paille ; mais les jeunes filles vous enchaînent et sont tendres avec vous ; les jeunes filles vous donnent ce qu’elles ont de plus doux. — Oh ! les jeunes filles sont bonnes à aimer !

Je suis un jeune cloarec de l’évêché de Quimper, et j’avais choisi ma maîtresse dans l’évêché de Tréguier, — une jeune fille au cœur joyeux, aux doux yeux étincelans ; elle habitait Leo-Drès dans la paroisse de Plestin.

Rien ne manque à ma plus aimée, ni les roses, ni les lis, ni le suave parfum de la jeunesse, ni le regard languissant, ni la douceur, ni l’esprit, ni les charmes mystérieux, ni les grâces du parler.

Je passerais ma vie entière rien qu’à la regarder. » —

Ici le jeune étudiant raconte comment il rencontra la jeune fille un jour du mois d’avril, comment il la connut et l’aima. Il rapporte leurs longs entretiens du dimanche, il peint son bonheur entrecoupé d’éclairs de repentir et de crainte, et ces souvenirs de Dieu et de sa vocation qui viennent le saisir parfois à la vue de la