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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 1.djvu/414

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REVUE DES DEUX MONDES.

ferai mettre l’escarboucle au plus haut de la tour de mon château pour servir de fanal aux passans. » — Quelle différence !… Combien le héros du drame breton l’emporte en énergie. Combien son insulte est plus audacieuse et plus poignante pour l’empereur !

Charlemagne, furieux, lève encore une armée et vient assiéger Montauban ; mais les quatre fils d’Aymon le défont dans une sortie, pillent le camp, enlèvent le dragon que Roland a placé sur sa tente, pour la distinguer, et en parent les girouettes du château.

Dans l’acte suivant, Charlemagne, désespérant de réduire les quatre fils d’Aymon par la force des armes, se résout à les prendre par trahison. Il menace le roi Yon de lui ôter sa couronne, s’il ne réussit à les lui livrer, et celui-ci en fait la promesse. En conséquence, le prince gascon annonce à Renaud qu’il a réussi à faire sa paix avec le roi de France, et qu’il n’a qu’à se rendre avec ses trois frères dans les plaines de Vaucouleurs, chacun d’eux n’ayant que son épée et portant des branches vertes dans la main. Là ils doivent trouver le roi et les douze pairs de France, qui les recevront à merci. Les trois frères de Renaud font quelques objections, et semblent craindre une trahison ; mais celui-ci les décide à le suivre, et ils partent tous les quatre, accompagnés de plusieurs comtes de la cour du roi Yon. Le jour est beau, la campagne verte, les oiseaux chantent dans l’air, et la chevauchée s’avance vers Vaucouleurs. Mais un fatal pressentiment semble peser sur tous ceux qui sont là ; tous marchent les fronts baissés et l’air soucieux. « Vierge Marie, dit tout bas Renaud, sauvez-nous de mort subite et de trahison. » Puis, se tournant vers ses frères : « Mais vous êtes tristes, mes frères, dit-il ; oh ! chantez, je vous en prie. »

RICHARD.

Vous le voulez, Renaud ? chantons alors, mes frères, chantons ensemble pour obéir à Renaud.

(Les trois frères chantent sur l’air mélancolique d’une complainte.)


À nous tous, joie, mes frères !
Nous allons à Vaucouleurs
Pour finir une guerre,
La guerre qui est cause que beaucoup d’hommes meurent.

Bénédiction de Dieu, du fond du cœur
Bénédiction de Dieu au roi Yon,
Car c’est lui, c’est lui seul
Qui a jeté la paix entre l’empereur et nous.