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REVUE. — CHRONIQUE.

le ministère doctrinaire. Il a été décidé que le véritable principe de cette administration, c’est le procès d’avril, que tous les efforts devaient être concentrés vers ce point, et que toute la puissance matérielle et morale du gouvernement serait employée à mener à bonne fin cette déplorable procédure.

Le second conseil tenu aux affaires étrangères a eu lieu le 21. On y a examiné quelle serait l’attitude du ministère à l’égard de la chambre ; M. Thiers a parlé avec beaucoup de mépris du tiers-parti et de la gauche, et c’est à la suite de ce conseil qu’il a fait rédiger l’exposé des motifs de la loi des fonds secrets. Selon sa vieille tactique, le ministère, qui sait combien la chambre redoute d’arrêter l’action de la police, la provoque, dans cet exposé de motifs, à un vote dont l’insuccès déciderait de la retraite des ministres.

Dans le dernier de ces conseils, qui a eu lieu avant-hier, il a été question du refus probable du maréchal Maison. Les lettres de notre ambassadeur, écrites de Saint-Pétersbourg à Mme la maréchale sa femme, laissent peu de doutes sur l’issue des propositions qui lui ont été adressées. Ces lettres étaient antérieures aux ouvertures faites au maréchal Maison, et nous avons déjà dit, dans notre dernière chronique, qu’elles avaient en quelque sorte décidé sa nomination. On ne voulait que du temps, et le loisir de chercher un ministre de la guerre. Mais le temps s’écoule, et le ministre ne se trouve pas. M. de Rigny, qui remplit l’intérim, ne peut pas accepter le ministère de la guerre. L’esprit de l’armée de terre s’oppose absolument à ce qu’un officier-général de la marine soit à la tête de ce département. Il existe même une protestation tacite des maréchaux à ce sujet. Aucun d’eux ne s’est encore présenté chez M. de Rigny ; et s’il y avait lieu de faire une visite officielle, comme celle qui est d’usage le 1er mai pour la fête du roi, il a été décidé que les officiers-généraux n’iraient chez l’amiral qu’en habits bourgeois, tant est grande la susceptibilité de l’armée de terre, qui craint d’admettre comme un antécédent la supériorité de l’arme à laquelle appartient M. de Rigny.

Dans l’embarras où se trouvent les ministres, n’ont-ils pas songé à s’adresser à M. de Caux, ce remplissage d’un des plus pitoyables ministères de la restauration. Un agent officieux et presque officiel fut donc envoyé à M. de Caux pour lui offrir le portefeuille que n’a pas encore refusé le maréchal Maison. M. de Caux, qui ne manque pas de sens et d’esprit de conduite, fit sentir à l’entremetteur ministériel tous les inconvéniens qui s’attacheraient à sa nomination ; mais comme l’agent ne se rebutait pas, et levait tant bien que mal toutes les difficultés, M. de Caux finit par lui dire avec un grand sérieux : Écoutez, il est un dernier obsta-