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qu’en 1813, époque où Napoléon avait besoin de l’alliance des États-Unis contre l’Angleterre ; sous la restauration, refus absolu de reconnaître le principe de l’indemnité ; et quand on l’a reconnu un moment, en échange de quelques avantages commerciaux, jamais le taux n’a été fixé au-dessus de 2,700,000 fr., et encore le gouvernement invoquait des compensations pour la Floride. Après la révolution de juillet, d’autres intérêts sont nés ; il y a eu des pots-de-vin, de l’argent donné, des achats de créances tombées aux mains des gens de cour, des fonds placés sur la banque des États-Unis par une pensée de prévoyance, et dont on a craint la confiscation. Tels sont les motifs réels du projet du gouvernement ; mais on sent qu’on ne pouvait les dire.

Au reste, quiconque a assisté aux dernières séances de la chambre des députés a dû se convaincre du peu de résistance que cette chambre pourra faire au système ministériel ; l’opposition y manque de deux conditions indispensables pour arriver à un résultat : l’énergie et la cohésion. Quelle que soit la nuance à laquelle on s’adresse, au tiers-parti, à la nuance Odilon Barrot ou Mauguin, on ne peut obtenir de ces hommes politiques un plan fixe de gouvernement, une idée arrêtée et des ministres choisis qui les mettent en action. La première condition des chefs de parti, quand ils veulent renverser un pouvoir, c’est d’avoir un ministère tout prêt pour remplacer celui qui existe. Or, ce ministère, où est-il ? dans quelle nuance le choisir ? On attaque à l’étourdie ; rien n’est concerté d’avance ; le tiers-parti a haine de la gauche, il tremble devant M. Garnier-Pagès et M. Lafitte ; la gauche méprise le tiers-parti ; M. Dupin a en jalousie M. Odilon Barrot. M. Odilon Barrot s’exprime fort durement sur M. Dupin. Au milieu de cette cohue, quelques unités politiques et administratives, telles que M. Calmon, M. Passy, sont toujours portées à faire des concessions au ministère, parce que cela entre dans leur plan de campagne pour arriver eux-mêmes au pouvoir. Et l’on ne veut pas qu’en face de cette opposition sans unité, sans vie politique, les doctrinaires, gens capables d’ailleurs, se tenant comme un seul homme, soient les maîtres des affaires ! C’est la condition des choses ; la chambre ne les aime pas ; elle murmure sous le joug, mais elle vote avec eux ; elle se résigne parce qu’il n’y a de pensées que dans la tête de ces hommes, et qu’ailleurs il n’y a qu’un éparpillement de votes réduits en poussière par le scrutin. Le projet pour la créance des États-Unis sera voté, les fonds secrets seront votés ; tout sera voté, parce que rien n’est prêt pour la résistance.

L’attention de la pairie est absorbée par le procès des accusés d’avril ; triste procédure que l’on poursuit avec tant d’acharnement ! Comme chambre politique, la pairie a peu de choses à faire ; elle a discuté la loi