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L’OR DES PINHEIROS.

pendant trois quarts d’heure au fond de l’eau en lisant paisiblement son bréviaire[1] ; mais elle vantait son zèle infatigable pour la conversion des indigènes. Pris en effet une fois par ceux-ci avec deux de ses compagnons, le père Macedo avait vu ces derniers attachés à des arbres et tués à coup de flèches par les sauvages. — Lui-même n’avait dû son salut qu’à un caprice de leur part, et en avait été quitte pour quelques mois de captivité, pendant lesquels il avait opéré des changemens miraculeux dans les mœurs de ces barbares.

La négociation fut longue et faillit plus d’une fois échouer. Après de nombreux pourparlers, l’éloquence du père Macedo réussit néanmoins à persuader les deux vieillards qui craignaient quelque perfidie secrète de la part du gouverneur. Chacun d’eux jura solennellement, pour lui et pour les siens, de suspendre toute hostilité envers ses adversaires jusqu’au départ et au retour des deux expéditions. Cette trêve de Dieu réglée, on tira au sort la route que prendrait chacune d’elles. Afin d’éviter tout conflit dans le désert, l’une devait se diriger à l’ouest, l’autre au nord, sans s’écarter de cette double direction jusqu’à ce qu’elles fussent parvenues à une distance qui fut fixée. La première s’engageait en outre, sous peine d’excommunication, à respecter les Indiens des Missions qu’elle pourrait rencontrer ; celle-ci tomba en partage aux Ramalhos.

Saint-Paul respira lorsque le père Macedo annonça que tout était terminé. Pendant un mois que durèrent les préparatifs de départ, on n’entendit en effet parler ni de sang répandu ni d’attaques contre les propriétés. Les Ramalhos mirent sur pied soixante-quinze hommes, et les Pinheiros environ quatre-vingts ; ces derniers étaient sous les ordres d’un neveu du vieux Pinheiro c’est le seul dont la chronique ait conservé le nom ; il s’appelait Jose Manoel Cabral.

À peu de jours l’un de l’autre, les deux partis quittèrent Saint-Paul. Les Ramalhos se rendirent sur les bords du Tiete, qui coule à quelques lieues de la ville, et s’embarquèrent dans un lieu alors inhabité, le même probablement où existe aujourd’hui le petit

  1. Voyez Vida de Joseph Ancheta, 1 vol. in-18, Salamanca, 1610.