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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 3.djvu/232

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les rapports du catholicisme avec l’état ont été profondément modifiés ; des biens ecclésiastiques ont été livrés à l’exploitation industrielle, sans que la foi populaire ait essayé une résistance que les événemens eussent rendue vaine ; l’administration tout entière a été bouleversée, les antiques circonscriptions ont été changées, et les fiers royaumes d’Aragon, de Castille et de Grenade, réduits à la condition de préfectures françaises sans que l’orgueil espagnol ait sourcillé.

La question dynastique, mêlée à ces grandes réformes, a rencontré son principal appui dans des provinces dont les intérêts, les habitudes indépendantes et démocratiques se sentaient compromis par une révolution qui s’opérera aussi pour elles-mêmes : provinces étrangères à l’Espagne par leur génie national autant que par leurs traditions historiques, qui se relèvent aujourd’hui pour traiter l’épée à la main avec les fils de leurs vainqueurs. Don Carlos s’appuie beaucoup plus en ce moment sur cette force que sur les résistances nationales au système politique fondé par le statut royal. Si le génie d’un grand homme de guerre enseveli dans sa victoire, si les efforts des puissances plus spécialement intéressées à l’avenir de l’Espagne, déterminent un arrangement, auquel l’humanité applaudirait autant que la politique, cet arrangement aurait pour conséquence la consolidation immédiate des réformes fondamentales opérées depuis trois ans, avec le maintien au pouvoir des hommes qui n’ont pas craint de les tenter dans des circonstances où le découragement eût été permis aux plus fortes ames.

Ces hommes sont ceux-là même qui, aux cortès de 1812 et à celles de 1820, se laissèrent aller à l’entraînement d’idées moins fécondes que leurs pensées actuelles ; ce sont nos constituans de 91 parvenus en 1835 avec des théories de moins et de l’expérience de plus.

Ils appartiennent aux classes moyennes tous ces riches négocians, ces généraux et ces navigateurs célèbres, ces hommes de lettres et de science, artisans de leur fortune politique, et jusqu’à ces titrés de Castille, pour la plupart nobles de fraîche date, si nombreux parmi les procuradorès espagnols, et qui relèvent par leur importance personnelle la chambre haute des royaumes d’Espagne et de Portugal ; car eux seuls jettent quelque éclat au milieu de cette grandesse héréditaire, étiolée dans la servitude domestique des cours. En 1826, don Pedro crut ne devoir élever à la pairie que les seuls fidalgos, idée fort rationnelle, constitutionnellement parlant, puisqu’on formait ainsi un corps aristocratique véritablement homogène, mais qui ne contribua pas peu à affaiblir la charte brésilienne et à en hâter la ruine.

Il peut être fort commode de jeter dans la presse en manière d’apo-