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DES PARTIS ET DES ÉCOLES POLITIQUES.

phthegme, qu’il n’y a pas de milieu pour la Péninsule entre le gouvernement du froc et celui du bonnet rouge, entre les agraviados et les descamisados ; cela n’a que l’inconvénient d’être absurde pour quiconque s’est donné la peine d’étudier le mouvement social en Espagne depuis le règne de Charles iii.

L’Italie, où vivent encore tant d’étincelles de l’esprit municipal, serait conquise aux mêmes idées, fruit naturel de la domination française, si l’oppression autrichienne n’était la préoccupation de tous les esprits généreux et ne contribuait à les entretenir dans une sombre et stérile exaltation.

Mais c’est surtout dans la puissante contrée qui a l’honneur de marcher avec la France à la tête de la civilisation du monde que la révolution semble s’asseoir dans des limites qu’on pouvait d’abord s’attendre à la voir dépasser. Le bill de réforme fut, comme la révolution de juillet, un évènement sans caractère spécial, d’une immense, mais vague portée, qui ne repoussait aucune interprétation, aucune espérance, et qui, en closant le cycle du passé, n’ouvrait pas encore celui de l’avenir.

C’était, il est vrai, substituer le droit rationnel au fait historique que de changer dans sa base le système électoral de la Grande-Bretagne ; c’était de plus s’engager à porter la cognée sur nombre d’institutions liées à l’ordre historique, incompatibles avec le triomphe des idées contraires. Mais au profit de quelle classe se feraient ces grands changemens ? Élèveraient-ils au pouvoir politique les ouvriers ou les chefs d’ateliers, la populace des villes ou les membres des grandes corporations municipales ? questions incertaines sans doute, quant à leur résultat définitif, mais qui semblent devoir aujourd’hui se résoudre dans le sens des intérêts de la classe moyenne.

On écarte, comme en dehors de toute discussion, l’éventualité d’un retour permanent du pouvoir aux hommes de l’aristocratie. Si, sous le ministère Grey, elle a constamment décliné le combat, si elle n’a plus tard reparu aux affaires que pour sanctionner et préparer des mesures repoussées par ses intérêts et plus encore par ses opinions, il est raisonnable de penser qu’en supplantant un instant le ministère Melbourne, elle a moins songé à arrêter le char sur la pente qui l’entraîne, qu’à y monter pour arriver au but avec lui, et n’être pas foulée sous ses roues inexorables.

Il est loisible de penser également que si le radicalisme théorique, professé par Cobbett dans ses pamphlets, par Hunt du haut de sa voiture à cirage, avait en Angleterre la force qu’on lui reconnaissait en d’autres temps, il eût gagné bien du terrain pendant la courte administration si