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DES PARTIS ET DES ÉCOLES POLITIQUES.

des idées fortes et vivantes, vers lesquelles incline, sans en avoir la conscience, l’esprit même des classes moyennes ?

Il est certain que les républicains sont morts : il ne l’est point que la république ne puisse pas surgir un jour de leur tombe. On peut affirmer qu’elle ne sortira désormais ni du Réformateur, ni du National. On n’affirmerait pas sans témérité qu’elle ne sortira point à la longue du Constitutionnel, du Temps, du Messager, du Courrier Français, du Bon Sens, organes des opinions centrales, qui, par des nuances graduées, descendent à une opposition qu’il y aurait par trop de bonhomie à dire purement constitutionnelle.

La monarchie a désormais moins à craindre les clubs que les boutiques ; elle doit moins redouter l’émeute que la sécurité au sein de laquelle couvent les révolutions. Dans un temps comme le nôtre, il n’y a, pour réussir, que les révolutions insensibles, parce qu’elles ne semblent pas des révolutions. Ainsi se fit en quinze années celle de 1830, à laquelle la bourgeoisie donna la main, quoique la veille encore elle protestât, non sans sincérité, de son horreur pour les perturbations politiques. Je suis moins touché des dangers patens de la monarchie actuelle que de l’entraînement général des esprits et des choses. La royauté doit moins redouter, à mon avis, les assauts, même le poignard de ses ennemis, que les défections de ses défenseurs. La force armée et l’exécration du pays peuvent protéger contre l’un de ces périls ; je cherche en vain un moyen de prévenir l’autre.

Cette puissance, à bien dire, négative du principe républicain, devenu instrument d’opposition et thème d’économie, ne s’exercera que sous condition de reprendre ces allures de comédie dont la presse quotidienne est coutumière. La monarchie de 1830 deviendra assez forte pour imposer l’hypocrisie à ses adversaires ; le sentiment du pays les ramènera, plus sûrement encore que des lois pénales, à une sorte de diapason constitutionnel. Mais, comme dans l’histoire de l’esprit humain, un mouvement critique se développe au sein même d’une époque organique, et simultanément avec elle, de même aussi l’on voit, au milieu des victoires du pouvoir, s’accumuler les germes d’une opposition redoutable. Des thèses, aujourd’hui sans retentissement, en trouveront, sous peu d’années, dans le pays, et jusqu’au sein des chambres. Après l’expédition d’Espagne, et ces élections faites, comme un Te Deum, au bruit du canon du Trocadero, M. de Villèle et ses amis ne prévoyaient pas le mouvement électoral de 1827, et la chambre qu’il produisit soupçonnait moins encore qu’elle sanctionnerait la révo-