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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 3.djvu/679

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LE PARLEMENT ANGLAIS.

que Westminster continuera de mirer ses tours dans la Tamise. C’est le sort des œuvres du moyen-âge. Ses édifices survivront à ses plus fortes institutions.

Notre pairie n’est pas seulement corps législatif, elle est en même temps cour de justice, et je n’entends point cour de justice extraordinaire, vis-à-vis de ses membres et des accusés de haute trahison, non, elle est cour permanente et régulière, cour d’appel suprême en matière civile ; ces deux attributions sont au surplus aussi distinctes que le permet la confusion inconséquente de ce double pouvoir : le bon sens de l’usage a réformé l’absurdité du droit. Quoique tout pair soit né juge compétent en toute cause, de même que législateur, la pairie ne siége comme tribunal que représentée par les légistes qu’elle a dans son sein. Ce sont, pour exemple, lord Brougham ou lord Lyndhurst, l’un et l’autre ex-chanceliers, qui donnent d’ordinaire audience le matin, et statuent en dernier ressort sur les arrêts civils déférés à la cour.

Chez nous, un divorce ne peut être prononcé que par acte du parlement. C’est la pairie qui instruit les procès de séparation. Comme il n’y est question que de faits dont l’appréciation ne requiert point la connaissance des lois, ces affaires se jugent indifféremment par les pairs légistes ou par les pairs lais qui se trouvent présens à l’ouverture de la séance politique. C’est que la pairie est alors à la fois cour et chambre ; amalgame barbare.

En cérémonie les pairs devraient siéger hiérarchiquement, c’est-à-dire les ducs aux banquettes de premier rang, les marquis aux secondes, les barons aux dernières. Cet ordre n’est pas observé. Ils se placent de même qu’aux communes, selon la couleur politique, barons, comtes, ducs ou marquis indistinctement. Aujourd’hui le ministère whig et les siens se tiennent à la droite du sac de laine ; l’opposition des tories à sa gauche.

Disons les whigs et les tories, car à la chambre des lords ce sont les noms qui conviennent. Toute l’aristocratie étant en eux, les pairs ne représentent qu’eux-mêmes, ils ne sont pas l’expression de tel ou tel parti ; ils sont leur propre expression. Lord Durham et lord Brougham, radicaux l’un et l’autre, sont deux anomalies, deux hommes fourvoyés.

Donc la classification est ici plus simple encore et plus facile qu’aux communes. Il y a toujours chez les lords, comme au dernier siècle, deux nuances d’aristocratie qui se disputent à main armée le pouvoir et ses bénéfices ; les tories, conséquens au moins avec leur principe anti-libéral, dont le triomphe, s’il était possible pacifiquement et sans