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imités, toutes les singularités sont contrefaites, et ce qui ne devait être qu’un jeu de l’esprit, est trop souvent pratiqué dans l’intention de tromper et de donner cours à des pages insignifiantes. Dans cette disposition des esprits, les éditeurs[1] des Mémoires de Tallemant des Réaux n’ont point été surpris de rencontrer des incrédules. Le premier volume de cet ouvrage, lancé tout seul, a été livré à la critique sans le cortége de ces travaux préliminaires, qui sont destinés à faire connaître l’écrivain, à initier le lecteur dans le secret des sources où l’on a puisé, et à montrer dans quels rapports l’auteur a vécu avec ses contemporains.

Ce n’a pas été sans regrets que nous nous sommes vus dans la nécessité d’introduire Tallemant des Réaux dans le monde littéraire sans aucun de ces appuis qui inspirent de la confiance et préparent les réputations. Nous n’avions encore recueilli qu’un petit nombre de renseignemens sur des Réaux ; nous espérions que des recherches plus opiniâtres nous procureraient des ressources qui nous manquaient. Leur espoir n’a pas été entièrement trompé.

Ce n’est pas, au reste, une faible victoire pour des Réaux d’être heureusement sorti d’une épreuve aussi difficile. Ceux qui ont lu ses Mémoires avec des dispositions de doute et de prévention, n’ont pas tardé à reconnaître que cet écrivain caustique et singulier, original et spirituel, révélait presque à chaque page des faits et des circonstances inconnus, qu’il serait dangereux d’inventer parce qu’on serait démenti par les Mémoires du temps, par les vaudevilles malins, dont fourmillent nos recueils, par les lettres

    pag. 90 et 215). Nous indiquerons ici un volume de M. le marquis du Roure, qu’il a dédié à ses confrères les bibliophiles français. L’ouvrage n’a été tiré qu’à soixante exemplaires. Il porte en faux titre : Réflexions sur le style original, sans date ni frontispice (Paris. 1829, in-8o). M. du Roure s’y est proposé d’établir que rien n’est plus aisé que de faire des pastiches ; rien, en effet, ne semble lui être plus facile. Il imite Rabelais, La Bruyère, Mme de Sévigné, Pascal, Voltaire, J.-J. Rousseau et Diderot ; et si ces morceaux étaient confondus dans les œuvres de ces auteurs, il serait difficile de reconnaître le don qui leur a été fait.

  1. M. Monmerqué lui-même, MM. de Châteaugiron et J. Taschereau.

    (N. du D.)