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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/257

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REVUE. — CHRONIQUE.

de la vente du château de Bagatelle, acheté par lord Yarmouth, qui ajoute ce domaine à tous ceux dont il jouit seul, et dont il fait une solitude. Lord Yarmouth est frère de lord Seymour. On s’occupe aussi du don Juan d’Autriche de M. Casimir Delavigne, qu’on doit représenter lundi prochain, et dont nous rendrons compte.


Œuvres choisies de Vico : Mémoires de Luther, traduction de M. Michelet[1]. Lorsque M. Michelet publia pour la première fois les œuvres de Vico, on lui reprocha d’avoir supprimé des développemens utiles, d’avoir interverti l’ordre des matières, enfin d’avoir modifié et mutilé Vico. Ce langage convenait parfaitement à ceux qui entendaient pour la première fois le nom du philosophe napolitain. M. Michelet a su démêler ce qu’il y avait de vrai et de fondé dans ces réclamations et en publiant une seconde édition de la Science nouvelle, il l’a fait précéder d’une biographie plus étendue de son auteur, et de la traduction plus ou moins complète des principaux opuscules de Vico ; ces améliorations ont de l’importance ; rien n’est plus profitable pour l’esprit humain, que de connaître les transformations successives au moyen desquelles les hommes de génie s’élèvent peu à peu à leurs sublimes conceptions ; que de les suivre dans leurs expérimentations, de s’initier parfaitement à leur méthode, de reprendre en sous-œuvre leurs recherches et leurs combinaisons. Il n’y a que les esprits superficiels ou les intelligences surnaturelles qui puissent se contenter d’un résultat abstrait, d’une affirmation pure et simple. D’un autre côté, combien n’est-il pas précieux et intéressant de connaître la vie de l’homme de génie, de pouvoir compatir à ses souffrances et de se former à son exemple. On retrouve les vies de Plutarque dans le berceau de tous les enfans qui doivent être un jour des grands hommes. Vico fut un des martyrs de la science, il s’offrit tout entier en holocauste à la pensée, méconnu par ses contemporains, il eut la conscience de son talent. « Depuis que j’ai fait mon grand œuvrage, écrivait-il, je sens que j’ai revêtu un nouvel homme, sa composition m’a animé d’un esprit héroïque qui me met au-dessus de la crainte et de la mort, et des calomnies de mes rivaux ;

  1. Librairie de Hachette, rue Pierre-Sarrazin.