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LE CHANDELIER.

JACQUELINE.

Nos prunes seront belles cette année, et nos espaliers ont bonne mine. Viens donc un peu de ce côté-ci, et asseyons-nous sur ce banc.

LA SERVANTE.

C’est donc que madame ne craint pas l’air, car il ne fait pas chaud ce matin.

JACQUELINE.

En vérité, depuis deux ans que j’habite cette maison, je ne crois pas être venue deux fois dans cette partie du jardin. Regarde donc ce pied de chèvre-feuille. Voilà des treillis bien plantés pour faire grimper les clématites.

LA SERVANTE.

Avec cela que madame n’est pas couverte ; elle a voulu descendre en cheveux.

JACQUELINE.

Dis-moi, puisque te voilà : qu’est-ce que c’est donc que ces jeunes gens qui sont là dans la salle basse ? Est-ce que je me trompe ? je crois qu’ils nous regardent ; ils étaient tout à l’heure ici.

LA SERVANTE.

Madame ne les connaît donc pas ? Ce sont les clercs de maître André.

JACQUELINE.

Ah ! est-ce que tu les connais, toi, Madelon ? Tu as l’air de rougir en disant cela.

LA SERVANTE.

Moi, madame ! pourquoi donc faire ? Je les connais de les voir tous les jours ; et encore, je dis tous les jours. Je n’en sais rien, si je les connais.

JACQUELINE.

Allons, avoue que tu as rougi. Et au fait, pourquoi t’en défendre ? Autant que je puis en juger d’ici, ces garçons ne sont pas si mal. Voyons, lequel préfères-tu ? fais-moi un peu tes confidences. Tu es belle fille, Madelon ; que ces jeunes gens te fassent la cour, qu’y a-t-il de mal à cela ?

LA SERVANTE.

Je ne dis pas qu’il y ait du mal ; ces jeunes gens ne manquent pas de bien, et leurs familles sont honorables. Il y a là un petit blond, les grisettes de la grand’rue ne font pas fi de son coup de chapeau.

JACQUELINE, s’approchant de la maison.

Qui ? celui-là avec sa moustache ?