Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
325
DES PARTIS ET DES ÉCOLES POLITIQUES.

armée de la bourgeoisie, a tranché par le sabre le nœud gordien des barricades ; les interprétations se sont brisées contre un fait, et l’école républicaine, réduite à merci, change aujourd’hui son front de bataille, comprenant trop tard qu’elle s’est séparée des forces vives de la France, en faisant scission avec les intérêts pacifiques du travail et de l’industrie, et du principe unique de progrès et de sociabilité, en se posant comme anti-chrétienne.

Il reste à montrer comment l’établissement du 9 août peut légitimement se dire l’expression même des classes qui l’ont institué et défendu ; puis l’on recherchera en quoi sa pensée politique pourrait, par ses applications ultérieures, s’éloigner des intérêts dont le faisceau le protège, et mettre, par ses propres fautes, le parti républicain en mesure de réparer les siennes.

Si l’on ne peut ramener à un seul fait tout le système de la monarchie actuelle, du moins en est-il un qui, dès l’abord, le domina tout entier. Quand les préoccupations publiques se portaient tour à tour vers les accidens si divers de ces terribles momens, il y avait au fond de toutes les pensées un mot qui dominait les autres, alors même qu’il n’était pas prononcé ; mot redoutable, vague et sombre comme l’horizon de ce temps, et qui devait fixer à la fois le sort de la monarchie nouvelle et celui des vieilles monarchies de l’Europe : c’était le glaive suspendu que, durant deux années, chaque secousse fit osciller sur le monde.

Ce qui saisit le plus vivement dans la révolution de 1830, c’est l’évidente incompatibilité des idées et des hommes groupés autour d’un pouvoir naissant, et n’attendant, pour commencer une implacable guerre, que l’instant où ce pouvoir, en faisant un choix, résoudrait l’énigme de sa propre existence.

Parcourez le Paris de juillet ; ses rues sont dépavées, le tocsin et la mitraille les ébranlent encore ; on y respire comme une tiède atmosphère de sang et de destruction. Suivez cependant le flot de ce peuple pavoisé des couleurs qu’il s’est conquises ; ce flot vous pousse vers un palais. Là siège une famille où resplendit le plus vieux sang du monde. À travers des antichambres gardées par des ouvriers en carmagnole, vous pénétrez dans des salles royales ; sous un dais de pourpre et des crépines d’or, brille une couronne autour de laquelle se presse une foule aux décorations étincelantes ; mais, dans cette foule et au-dessus d’elle, Lafayette, à la poitrine nue, protège de sa parole républicaine et de son geste populaire la royauté qui s’appuie sur son bras. De respectueuses harangues se mêlent au son des hymnes sanglantes, et dans