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REVUE DES DEUX MONDES.

Après avoir traversé les enfers, dont il fait une belle peinture, il arrive jusqu’à Pluton, qu’il trouve avec sa Proserpine. Celle-ci l’accueille avec un sourire et obtient de son époux le droit de prononcer sur le sort d’Andrea.


C’est alors, Vengeance, qu’elle t’a parlé bas à l’oreille, et t’a commandé de me guider à travers les portes de corne par où passent les songes dans le silence de la nuit ; et à peine a-t-elle eu parlé, qu’en un clin d’œil nous nous sommes trouvés ici, je ne sais pas comment.

LA VENGEANCE.

Apprends, Andrea, que tu es arrivé où tu verras l’auteur de ta mort, don Balthazar, prince de Portugal, privé de la vie par Bel-Imperia. Asseyons-nous ici pour voir le mystère, et pour servir de chœur dans cette tragédie.


N’est-ce pas une conception heureuse, une préparation pleine d’adresse que ce prologue où le chœur antique est remplacé par un fantôme intéressé dans les événemens qui vont se dérouler à ses yeux sur la scène, et l’intérêt si vif que ce témoin partial prend à l’action ne se communique-t-il pas nécessairement au reste des spectateurs ?

La tragédie commence comme la seconde scène de Macbeth : un général fait au roi d’Espagne un récit de la bataille dans laquelle don Andrea a été tué par don Balthazar, prince de Portugal, qui lui-même a été fait prisonnier par don Horatio, fils d’Hieronimo, grand justicier, et par don Lorenzo, frère de Bel-Imperia, fille du duc de Castille. On peut remarquer, dès ce début, que, toute proportion de talent gardée, le ton général du style est assez semblable à celui de Shakspeare : même emploi de la mythologie, seulement à doses plus fréquentes ; de plus, force citations latines, espagnoles, italiennes, etc., même dans la bouche des femmes.

Entre l’armée qui défile devant son roi. Balthazar paraît ; à ses côtés sont Lorenzo et Horatio qui se disputent sa prise. Il résulte de leurs explications que tous deux ont contribué à cette glorieuse capture. Le roi décide que la garde du prisonnier, ses armes et son cheval seront la récompense de son neveu, et qu’à Horatio appartiendra le prix de la rançon.