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une flétrissure, my name receives a brand. Ayez pitié de moi, et souhaitez que je sois renouvelé, tandis que, comme un patient volontaire, je boirai un antidote d’Eysell contre ma forte corruption
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Je ne puis toujours t’avouer, de peur que ma faute déplorée ne te fasse honte. Et toi, tu ne peux m’honorer d’une faveur publique, sans ravir l’honneur à ton nom : unless thou take that honour from thy name. »

Des commentateurs se sont figuré que Shakespeare rendait hommage à la reine Élisabeth ou à lord Southampton, transformé symboliquement dans les sonnets en une maîtresse. Rien de plus commun au xve siècle que ce mysticisme de sentiment et cet abus de l’allégorie : Hamlet parle d’Yorick comme d’une femme, quand les fossoyeurs retrouvent sa tête. « Hélas ! pauvre Yorick ! je l’ai connu, Horatio : c’était un compagnon joyeux et d’une imagination exquise
.............. Là étaient attachées ces lèvres que j’ai baisées ne sais combien de fois ! » That I have kiss’d, I know not how oft. Au temps de Shakespeare l’usage de s’embrasser sur la joue était inconnu : Hamlet dit à Yorick ce que Marguerite d’Écosse disait à Alain Chartier.

Quoi qu’il en soit beaucoup de sonnets sont visiblement adressés à des femmes. Des jeux d’esprit gâtent ces effusions érotiques ; mais leur harmonie avait fait surnommer l’auteur le poète à la langue de miel.

Le créateur de Desdémone et de Juliette vieillissait sans cesser d’être amoureux. La femme inconnue à laquelle il s’adresse en vers charmans, était-elle fière et heureuse d’être l’objet des sonnets de Shakespeare ? On peut en douter : la gloire est pour un vieil homme ce que sont les diamans pour une vieille femme : ils la parent, et ne peuvent l’embellir.


That time of year thou may ’st in me behold
When yellow leaves, or none, or few, do hang, etc.


« Tu peux voir en moi ce temps de l’année où quelques feuilles jaunies pendent aux rameaux qui tremblent à la brise ; voûtes en ruine et dépouillées où naguère les petits oiseaux gazouillaient
............... Tu vois en moi le rayon d’un feu qui