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LES COLONIES À SUCRE ET LA PRODUCTION INDIGÈNE.

Le sucre colonial sera taxé, et alors il n’arrivera sur nos marchés qu’autant que la concurrence du sucre de betterave le lui permettra. Le tarif sera simple et concordera avec celui que l’on voudra exiger de la production indigène, si on entend la soumettre à un impôt. Comme il n’y aura plus de coërcition à apporter du sucre en France, ce qu’il en viendra servira de mesure pour l’établissement de la taxe locale. Quand on cessera d’en apporter, c’est que la taxe étrangère sera trop forte ou la taxe intérieure trop faible, et on verra où il convient d’appliquer le remède, pour conserver le revenu.

Sous l’empire d’une législation semblable rien de plus simple que les débats, tandis qu’à présent il est impossible de s’entendre en raison d’une concurrence forcée à laquelle ni l’une ni l’autre des espèces de sucre ne peut échapper. Laissez le sucre colonial libre de prendre une autre direction, et le mouvement commercial vous indiquera ce qu’il faudra faire. Le revenu public ne peut pas être plus compromis qu’il ne l’est à présent, car enfin les Anglais paient leur sucre colonial chez eux vingt-six pour cent de plus que nous ne payons le nôtre. C’est là une indication assez forte que la concurrence intérieure, en France, peut arriver au point de forcer, comme cela a déjà eu lieu, la réexportation d’une grande partie du sucre colonial. Mais de combien de dommages pour le producteur cette réexportation n’est-elle pas accompagnée ! Sa production est déjà surchargée par l’effet du monopole d’importation en faveur de la métropole, et il lui faudra supporter une correspondance nouvelle, un frêt et des assurances, des frais de mise à terre, de magasinage, de commission, de réembarquement, tout cela en pure perte ! Qui pourrait y résister ? Une campagne ou deux au plus termineront la ruine des colonies, et c’est pour un ajournement de deux ans avec un déficit sur chaque prévision du budget, que l’on voudrait ne pas prendre immédiatement le seul parti que la raison avoue.

Nous ne songeons pas à indiquer la suppression de la culture de la betterave. En Angleterre on hésite moins dans les questions qui intéressent le fisc et le commerce. L’Irlande avait été oubliée dans la prohibition de culture du tabac ; cette partie du royaume-uni a été ramenée, il y a cinq à six ans, à la loi commune : aussi les tabacs rendent avec les licences 80 millions de francs, les spiritueux 75 millions, et le sucre, comme nous l’avons dit, 112 millions, ce qui avance beaucoup la somme de 425 à 450 millions perçue par les douanes.

L’accise, branche qui rapporte autant que la précédente, a sous sa direction le thé qui rend 85 millions et la drèche qui produit 125 millions. Avec de pareils items on a pu renoncer à bien des taxes insignifiantes.

Pour revenir à notre situation particulière, la loi proposée repose sur