Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 6.djvu/419

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
415
LA BELGIQUE.

sous le coup de cette stipulation. L’occupation des principales places des Pays-Bas, par suite du traité de la Barrière, ne tarda pas à livrer également à la Hollande le monopole de leur commerce intérieur, en rendant les garnisons néerlandaises maîtresses des grandes lignes de canalisation. L’Escaut et le canal du Sas-de-Gand furent comblés, et la Belgique ne respira plus que par Ostende.

Dans cette ville, si heureusement située entre la Manche et la mer du Nord, vivaient encore les restes de l’esprit entreprenant qui avait fondé l’antique prospérité des Flandres. Le prince Eugène, appelé au gouvernement général des Pays-Bas, favorisa l’établissement, dans ce port, d’une compagnie des Indes orientales. Un instant cette tentative fixa l’attention du monde commercial ; c’est dire assez qu’elle éveilla vite la jalousie des puissances maritimes. La cour de Vienne, dominée par la nécessité de s’assurer leur alliance, recula devant des menaces et des intrigues, et l’empereur suspendit, pour sept ans, la compagnie d’Ostende, qui ne se releva plus.

La Belgique s’éteignait ainsi, bloquée dans ses ports par les flottes de la Hollande, dans ses places de guerre par ses baïonnettes ; ses plaintes arrivaient à peine jusqu’à l’Europe, qui, pour la dédommager des débouchés enlevés à son agriculture, allait, chaque printemps, engraisser ses campagnes d’une couche de cadavres. La décadence de sa bourgeoisie fut rapide comme celle de ses villes, frappées par l’interdit du droit maritime ; sa noblesse alla cultiver ses terres à l’ombre du clocher, ou porter une clé de chambellan dans les résidences allemandes. Le peuple seul s’agitait quelquefois au souvenir de la prospérité d’un autre siècle, et gardait avec une jalousie turbulente ses priviléges municipaux qui la lui rappelaient encore.

La domination autrichienne commença et finit entre deux émeutes. L’une fut un tumulte de carrefour, l’autre une révolution. La potence eut raison de la première, une armée recula devant la seconde ; et cependant, dans ces faits si dissemblables par leur importance apparente, l’historien doit comprendre qu’il s’agit d’une même cause, et que l’échafaud d’Anneessens annonça la grande insurrection brabançonne.

En 1717, au moment de la plus grande fermentation causée par les stipulations auxquelles venait d’accéder l’empereur Charles VI, les doyens des neuf nations de Bruxelles, choisis pour former le nouveau corps municipal, refusèrent de jurer un réglement, qui leur sembla contenir des clauses nouvelles, protestant que le prince ne pouvait, pas plus que le conseil de Brabant lui-même, restreindre les priviléges des nations sans porter atteinte à la joyeuse entrée.

Le marquis de Prié, ministre de l’empereur, accusé déjà d’entretenir