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Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 6.djvu/70

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REVUE DES DEUX MONDES.

il vous avait écrit, il est parti avec un homme du pays, pour aller faire une course aux environs de Chamouny, à la recherche d’une mine d’or, dans un endroit où il y a de grands précipices. Mon cher père était si passionné, comme vous le savez, pour les mines, que malgré les défenses réitérées que nous lui avions faites, il a voulu partir. Mon père et son compagnon sont allés jusqu’au bord du précipice ; mais là, comme le chemin était étroit et glissant, ce dernier n’a pas voulu aller plus loin. Mon père, qui, vous le savez bien, était un intrépide, quoiqu’il eût soixante-dix-huit ans, a continué son chemin, malgré les cris de son compagnon, qui a fait tout ce qu’il a pu pour l’arrêter : mon père n’a voulu entendre à rien. Alors l’autre est revenu chez lui, sans oser me faire connaître que mon père était resté dans la montagne. Au premier moment où je sus son arrivée, j’allai chez lui. Il y avait déjà trois jours qu’il était revenu. Pressé par mes questions, il me dit qu’il n’avait pas bonne idée de mon père. Sur ce mot, je courus chez moi prendre un bâton ferré, et je revins lui dire de me conduire où il l’avait quitté. Il me mena jusqu’au sentier où ils s’étaient séparés, et je pris la route qu’avait prise mon père ; mais pendant deux jours et deux nuits, je l’ai cherché et appelé en vain, et je n’ai aucune trace de lui, ni vivant, ni mort. Sans doute il aura été entraîné par une avalanche, ou précipité dans un glacier… »


Je laissai tomber la seconde lettre auprès de la première, et je fis brûler les autres sans les décacheter.


Alex. Dumas.