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LES CÉSARS.

i.

AUGUSTE.


Nous voudrions faire ici une suite d’études, non sur des époques, mais sur des hommes, non de l’histoire, mais de la miniature historique, de la physiologie humaine. Nous voudrions savoir quelle sorte d’homme c’était qu’un Tibère, un Domitien, noms répétés tant de fois, et qui apportent à nos esprits des idées si complexes, si peu comprises. Nous voudrions faire comme le philosophe Apollonius, qui vint d’Asie pour voir Néron et pour apprendre « quelle sorte de bête c’était qu’un tyran. »

Un homme, quelquefois presque un enfant, doué tout uniment du pouvoir de vie et de mort sur cent vingt ou cent quarante millions d’ames intelligentes, sur toutes les rives du bassin de la Méditerranée (cet admirable et éternel théâtre de la civilisation et de l’histoire), sur tout le monde policé, en un mot ; et cet homme, un fou, un fou furieux et sanguinaire, faisant tomber les têtes au hasard, massacrant par partie de plaisir ; et cet homme supporté, honoré, adoré, par tout ce qu’il y avait alors au monde d’orgueil, d’intelligence, d’énergie ; — et cet homme, quand au bout de quinze ans un proscrit plus heureux avait prévenu le mes-