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REVUE LITTÉRAIRE.

en parodiant ainsi Cicéron : « Enfin Catilina est sorti de Rome ! il ne déchirera plus le sein des vrais enfans de Rome ! Abiit… ! » Un autre adversaire, que M. de La Mennais a déjà rencontré plusieurs fois, est plus incisif encore. « Parlez-vous de sa personne, dit-il, il est mort ! Parlez-vous de sa doctrine, sous ce point de vue, s’il n’est pas mort, il devrait l’être[1]

Le but de ce dernier écrit est de défendre contre les novateurs l’ancienne théologie scolastique, c’est-à-dire, la science divine exposée selon la méthode analytique et dialectique d’Aristote : nous reproduisons fidèlement la définition de l’auteur. Selon lui, la foi chrétienne ne peut être sauvée que par le philosophe païen. Il paraît cependant que les jeunes clercs montrent peu de goût pour le syllogisme, et de son propre aveu, « ils emploient leur temps à la lecture de la basse et moderne littérature française, où respire plus ou moins le goût romantique, étude plus propre à nourrir leur esprit de vent que de vérité et de sagesse. » C’est à quoi l’on veut mettre ordre. Ainsi, après une trêve de dix ans, deux ennemis irréconciliables, Aristote et le romantisme, vont se rencontrer de nouveau sur le terrain de la théologie. Nous publierons, s’il y a lieu, le bulletin du combat.

Nous avons trouvé, dans plusieurs ouvrages signés par des prêtres, une singulière prétention. À les en croire, il est injuste, inhumain, de reprocher au clergé français son infériorité, après l’avoir dépouille des biens qui lui permettaient d’encourager par des bénéfices les hommes distingués de son ordre, et d’entretenir ces sanctuaires d’études illustrés jadis par de beaux monumens littéraires. Leur erreur est grande, s’ils pensent qu’on fait crime au clergé de ne pas produire des compositions académiques. Ce que lui demandent les gens sensés, c’est de substituer aux pratiques superstitieuses, aux aberrations mystiques, une instruction saine, un parler ferme et franc, intelligible pour le peuple qu’il se propose de transformer ; c’est d’exposer sa foi de telle sorte, qu’elle surmonte, s’il est possible, les préventions hostiles, et redevienne ce qu’elle a été long-temps, un lien social. Pour composer un livre de cette nature, il n’est pas besoin d’une congrégation de bénédictins. D’ailleurs, l’excuse invoquée par les prêtres est d’autant moins recevable, qu’ils sont en meilleure position que les autres citoyens pour agir sur les esprits. Ils n’ont pas à vaincre les obstacles de tous genres qui attendent le littérateur isolé. À celui-ci, il est rarement permis de marcher droit dans la route où il aperçoit le beau et l’utile. Il faut, pour s’assurer édi-

  1. Défense de l’Enseignement catholique, par M. Boyer, directeur de Saint-Sulpice ; un vol.  in-8o.