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quelque sorte commentée par son rapprochement avec une loi française. Les fastes du parlement britannique expliqueront un incident soulevé au sein du sénat. Cette méthode donne lieu à des aperçus souvent neufs, et dont les publicistes modernes pourraient faire leur profit. Le passage suivant nous paraît dans ce cas : — « Dans l’antiquité, dit l’auteur au sujet de la mission législatrice confiée aux décemvirs, on ne votait jamais sur les articles d’une loi ; l’on ne votait pas non plus sur des changemens proposés par d’autres que par ses rédacteurs. On adoptait ou l’on rejetait l’ensemble et dans sa forme primitive. » — Cette remarque est développée dans une note ainsi conçue : — « Depuis l’assemblée constituante, le contraire se pratique sur le continent. Sous la restauration, surtout, les amendemens des commissions ont souvent changé l’esprit de la loi, ce qui n’eût été qu’un petit mal ; mais il y en eut d’improvisés qui y introduisirent des changemens et des contradictions. Grâce à la raison qui préside encore aux affaires politiques de l’Angleterre, elle est demeurée étrangère à cette singulière opinion, que la perfection peut résulter d’une sagesse collective. »

L’histoire, ainsi traitée, gagne sans doute en vérité et en précision, mais ne perd-elle pas beaucoup en intérêt et en puissance ? Le meurtre de Virginie, la prise de Rome par les Gaulois, l’exil de Camille, la conjuration de Manlius, et tant d’épisodes qui ont animé d’admirables tableaux, ne causent pas plus d’émotion chez le critique allemand qu’un compte rendu de gazette. Tous ces braves Romains qui, mis en scène par Tite-Live, Rollin ou Vertot, jouaient si magnifiquement leurs rôles de grands hommes, ont disparu. Après les illusions du drame, c’est l’analyse du feuilleton.

Le Précis des guerres de César[1], par Napoléon, annonce une connaissance parfaite des plans, des ressources, des intentions du capitaine romain. On y croit sentir une mystérieuse intelligence établie entre deux grands génies. Le bulletin de chaque campagne de César est suivi d’observations où le commentateur français expose en maître les variations et les progrès de la science militaire. Quelquefois, après avoir établi solidement les légions romaines dans leur camp retranché, il se donne le plaisir de les entamer avec l’artillerie, de les culbuter avec quelques régimens français. Le style est net, exact, parlant. Il ne justifie pas cependant le titre d’écrivain, qu’on a trop souvent ajouté aux titres plus légitimes de Napoléon.

Nous avons remarqué dans le dernier volume publié par l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, cinq Mémoires sur l’histoire romaine, par

  1. Librairie de Charles Gosselin, rue Saint-Germain-des-Prés.