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proposait d’entrer en campagne le 1er novembre pour l’expédition de Constantine.

Nous ne saurions blâmer le ministère de n’avoir pas voulu, en l’absence des chambres, outrepasser trop largement les crédits alloués ; mais le pouvoir exécutif doit demander à la puissance parlementaire, une fois pour toutes, les moyens de faire tout ce qui est nécessaire, sauf à en rendre un compte exact et sévère. Quant au bruit qui avait couru qu’on donnerait Alger en fief à M. de Mortemart, comme un hommage rendu aux gloires de la restauration, rien n’est plus ridicule. M. de Mortemart visitera Alger, mais en simple voyageur, mais pour reconnaître de quels terrains il pourrait devenir propriétaire. Il n’emmène pas avec lui un corps d’armée, mais seulement le vieux duc de Caraman, qui, malgré ses soixante-dix-huit ans, éprouve la curiosité d’aller visiter la plage africaine.

Pendant que nous nous occupons de l’Afrique, nous voyons s’avancer lentement, vers la base qu’il doit occuper, l’obélisque, qui se confond dans l’esprit de la population parisienne avec les souvenirs de notre expédition d’Égypte. La ville de Napoléon possédera un monument de Sésostris. Pourquoi l’a-t-on placé sur la place de la Révolution ou de la Concorde ? pourquoi pas ailleurs ? Les intérêts de l’art et de la perspective ont été moins consultés que certaines convenances politiques. Il faut en finir avec cette place, aurait dit un auguste personnage ; et il a été décidé que le théâtre des tragédies sanglantes de la révolution serait occupé par l’impassible monument de la civilisation égyptienne. Voilà les jeux de l’histoire ; il y a dans cette destination je ne sais quelle ironie amère et froide. Que diraient Robespierre et Larochejacquelein s’ils voyaient cette fin de non-recevoir opposée à leurs passions contraires ? Il est probable que la prise de possession est définitive, et que le champ de bataille de 93 appartient irrévocablement aux hiéroglyphes de Thèbes et de Memphis.


— Il paraît qu’enfin les excès de la contrefaçon belge commencent à appeler sérieusement l’attention du gouvernement français sur les moyens de protéger efficacement une branche d’industrie si importante pour nous, et à laquelle se rattachent de plus en plus tant d’existences. L’annonce de fondation des sociétés en commandite par M. Hauman au capital de 1,500,000 ; par M. Wahlen au capital de 100,000,000, et par M. Meline, au capital de 2,000,000, pour la contrefaçon de tout ce qui sortira des presses françaises, est bien propre à donner le signal d’alarme à notre librairie entière. Ce ne sont plus seulement les romans, les livres de poésie, qui vont être contrefaits par nos voisins ; ce sont les livres