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produits d’une fabrication proportionnée. Il est donc fort important de ne pas provoquer le commerce de la Suisse à se jeter plus vite et plus complètement qu’il ne pourra y être amené par d’autres causes, dans une voie différente.

Mais l’importance politique et commerciale du maintien des relations amicales qui ont existé de tout temps entre la Suisse et la France, est trop vivement sentie pour exiger de plus longs développemens. L’intelligence publique les prévient et y supplée. Il suffit de l’avoir indiquée ; et nous n’en avons même parlé que pour arriver à priori à la conclusion suivante : c’est qu’on ne peut guère supposer qu’un gouvernement essentiellement pacifique, un gouvernement à qui on a reproché de l’être beaucoup trop, un gouvernement qui a plutôt cherché à tourner les difficultés extérieures qu’à les vaincre, à les éluder qu’à les aborder en face, et qui se présente comme le plus ardent promoteur de tous les intérêts matériels du pays, qu’un pareil gouvernement, disons-nous, ait, non pas suscité de gaieté de cœur, mais même amené par des imprudences condamnables une complication aussi fâcheuse sous tous les rapports, que celle dont nous avons à retracer l’origine et les progrès.

La France s’est vue plusieurs fois, dans ces derniers temps, forcée de prendre, soit à l’égard de certains cantons, soit à l’égard de la Confédération helvétique tout entière, une attitude qui semblait démentir ses protestations officielles de bienveillance. Les divers incidens qui lui ont imposé cette pénible obligation se sont malheureusement succédé dans le court espace d’une année ; et cet enchaînement de difficultés, qui n’était que l’effet du hasard, a dû revêtir, pour des yeux prévenus, l’apparence d’un système. C’est aussi M. le duc de Montebello qui en a supporté presque seul tout le poids. Il y a eu d’abord l’affaire de Bâle-Campagne, que le ministère de M. de Broglie a léguée au cabinet du 22 février ; puis l’affaire du Jura catholique et des articles de Baden avec le canton de Berne, qui appartient exclusivement au ministère de M. Thiers ; enfin sont venues la question des réfugiés et l’affaire Conseil, qui ont laissé au nouveau cabinet l’exécution d’un engagement (pris par la Suisse) à surveiller et la réparation d’une offense à obtenir. Jusqu’au différend avec Bâle-Campagne, le gouvernement français n’avait, pour ainsi dire, à jouer en Suisse