Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 8.djvu/379

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
375
REVUE. — CHRONIQUE.

du droit, qui, sans entrailles et sans équité, flétrissent la vie entière de jeunes gens à peine sortis de l’enfance, et coupables d’une étourderie qui méritait uniquement une censure académique !

À l’intérieur tout est fort tranquille. C’est à tort que dans quelques départemens on a cru à une brusque dissolution de la chambre ; ni le président du conseil, ni une volonté plus haute encore, ne songent à prendre ce parti. Le ministre de l’instruction publique désire seul la dissolution, et l’ordre est donné au ministère de l’intérieur de s’y préparer à tout évènement. En attendant, on dispose tout pour bien recevoir l’ennemi parlementaire.

En l’absence des chambres, une partie du ministère a cherché à se concilier la littérature ; c’est dans cette intention qu’ont été créées les deux commissions chargées d’élucubrer deux projets de lois, tant sur la contrefaçon que sur la propriété littéraire. Il y a plus de faste que de portée dans ces mesures ministérielles. La question de la contrefaçon est toute diplomatique, et le ministre des affaires étrangères peut seul la mener à bien ; elle reviendra nécessairement à M. Molé, malgré l’ambitieux empressement de M. Guizot. Quant à la propriété littéraire, la commission est-elle résolue d’aller au fond de la question ? le peut-elle ? le veut-elle ? A-t-on songé qu’on ne pouvait résoudre les difficultés de la matière sans aborder le problème entier de la propriété même. Où sont dans la commission les jurisconsultes et les publicistes capables de se mesurer avec les difficultés du sujet ? Si la commission accouche d’un projet de loi, ce qui est douteux, comment ce projet subira-t-il l’épreuve de la tribune, l’examen parlementaire des jurisconsultes de la chambre, de MM. Dufaure, Vivien, Odilon Barrot, Comte, Dupin ? Au fond, M. Guizot se soucie peu du résultat ; mais il aura séduit quelques amours-propres, et caressé la cupidité de quelques hommes qui demandent à leur plume, non plus l’honneur et l’indépendance, mais la fortune des anciens fermiers-généraux. On dit que M. de Rémusat est tellement dégoûté des intrigues et des convoitises dont il a le spectacle, qu’il a pris la résolution de ne plus se mêler des affaires secrètes de la presse ; nous le lui avons prédit, il ne fera jamais complètement la besogne dont il s’est imprudemment chargé ; il a pour cela trop d’honneur et de paresse.

Nous avons entendu des hommes politiques, tout en admirant la dernière harangue de M. Odilon Barrot, regretter que cet honorable orateur se soit borné à de brillantes généralités sans prendre position au sein même de la question du moment. Mais il ne faut pas oublier la différence qui sépare une harangue aux électeurs en dehors de la chambre, et un discours qui s’adresse à l’assemblée même. M. Odilon Barrot a reçu de son talent et de son caractère la mission de travailler à l’éducation